Edward & Bella

Edward & Bella

samedi 30 avril 2011

43 - Un cheveu sur la soupe

POV Alice (quelques heures plus tôt) :

OOOOH mais c’est vraiment génial !
Je suis trop, mais alors trop contente !
Pas la peine de chercher à trifouiller dans mon cerveau, crétin, je ne te laisserai pas faire !
Non mais !
Hihihi ! Je le sais que tu as horreur des défilés de mode et de la macarena, mais tant que tu chercheras à venir dans ma tête, c’est la seule chose que tu y trouveras !
Enfin !
Il s’en va enfin !
Impatient en plus.
Et nerveux aussi, mais faut le comprendre le petit frère : ça fait 3 semaines que sa Bella l’ignore totalement…
Ça me faisait mal au cœur de voir Bella ainsi et surtout de la voir s’enfoncer dans cet espèce de mutisme, mais maintenant, je suis rassurée. Les dernières nouvelles sont excellentes et Bella sort enfin de sa coquille !
J’en connais un qui va avoir une sacrée surprise ce soir…
Parce que c’est du chaud-bouillant qu’elle lui réserve, mais surtout…

- Alors Alice, t’as vu quoi ?
- D’après toi, Rose ? Que des bonnes choses ! Du concentré de bonheur en tube ! Tant qu’à faire, je vais tous vous mettre au courant en même temps, ça m’évitera de me répéter… J’appelle Jazz pour qu’il partage la bonne nouvelle avec nous !


Je m’installe dans le sofa, frétillante de joie alors que tout le monde me regarde comme si j’avais un bras greffé sur le front. J’appelle mon mari adoré et il décroche à la première tonalité.

- Oui ma gazelle ?
- Salut mon Jazz, ça va mon amour ?
- Ça pourrait si tu ne me manquais pas autant ma belle…
- Dis-moi mon cœur, est-ce que Carlisle est avec toi ? J’ai une nouvelle à vous annoncer !
- Il s’est passé quelque chose ? C’est grave ?
- Non Jazz, non ! Une vision. Qui aura lieu ce soir. C’est justement ça la grande nouvelle !
- Tout le monde est là justement, Carlisle, Kate, Laurent, Jared, Victoria…
- ILS VONT SE MARIER ! ! ! !
- Hein ? Quoi ? De qui tu parles bébé ?
- Edward ! Bella ! Elle va faire sa demande ce soir et il va dire oui ! C’est trop génial !
- Bella ? C’est elle qui va…
- OUIIII ! C’est elle qui va sauter le pas ! Mais chut ! Edward ne le sait pas encore ! En fait, il ne le saura que cette nuit ! Oh c’est trop génial !
- Ah ! Ils ne font vraiment rien comme tout le monde ces deux-là ! En tous cas, ça fait bien rire le groupe ! Eh ! Tu nous préviendras quand le futur marié sera au courant, qu’on puisse le chambrer un peu ?
- Rhooo… C’est pas sympa ça, mon Jazz ! Mais je ne peux rien te refuser, tu le sais ! Et puis… ce sera bien fait pour lui ! Depuis le temps qu’il contemple son caillou et qu’il s’interroge sur quand faire sa demande… Il se fera sacrément coiffer au poteau ! Bon, je te laisse mon cœur, j’ai deux trois petites bricoles à faire !
- Pas de souci mon Alice. De toute façon, on se voit cette nuit, ça y est, on rentre !
- J’ai hâte Jazz, j’ai hâte… Je t’aime !
- Je t’aime aussi ma gazelle… A tout à l’heure, je t’embrasse !

Je raccroche, extatique.
Mon Jazz rentre dans la nuit et mon petit frère va se marier !
Emmett et Jacob se marrent comme des baleines à l’idée que ce soit Bella qui pose un genou au sol. Quelle bande de truffes !
J’ai vu ce qu’il va se passer… Comme c’est romantique !
Je ne pensais pas que Bella aurait le cran de faire ça, mais apparemment si…
Je me concentre…
Humm… Humm… Non, les choses ne changent pas… ça va toujours se passer comme ça !
GENIAL !
Par contre, ça m’énerve cet espèce de flou sur l’après ‘oui’…
Il n’était pas là tout à l’heure…
Bah, ça doit encore être ce fichu bouclier qui fait des siennes. Bella disparaît régulièrement de mes visions quand elle active la partie physique de son bouclier.
Ah ! Enfin !
Ils sont partis du cottage !
Je vais pouvoir préparer quelques petites choses qui feront plaisir à Bella…

- Euh… Dis-moi Emmett, tu veux bien me rendre un petit service ?
- Tout ce que tu veux petit lutin frétillant !

Petit lutin frétillant… Non mais c’est vraiment du n’importe quoi, là !

- Dis-moi mon grand frère adoré, pourrais-tu chasser un ours et deux pumas et embouteiller le sang s’il te plait ?
- Bah ! Pourquoi ça ?
- Parce que je pense que leur soirée se terminera autour d’un verre ! C’est si romantique…
- Rho mais euh ! J’ai pas fini ma partie de… AÏE ! Mais Rosie ! Arrête de me frapper !
- T’as qu’à être moins con, Em’ ! Allez hop ! Lève tes fesses et ramène deux pumas et un ours pour Alice ! Allez, plus vite que ça ! S’écrie Rosalie en tapant du pied au sol.
- Jacob va t’accompagner et t’aider dans ta chasse. N’est-ce pas mon loulou d’amour ?
- Oui Tanya. Allez, viens Emmett ! Parce que toi, si tu connais pas ce regard-là, moi j’le connais très bien : ça veut dire « fais ce que je te dis ou sinon tu peux faire ceinture pendant un bail »…

Ah !
Enfin des hommes bien dressés, comme il se doit.
Nous les regardons partir en ricanant et j’ai à peine le temps de me retourner qu’Esmée me tend son service de verres en cristal de Baccarat. Je m’en saisis délicatement avant de me diriger vers l’entrée.
Je me retourne vers ma sœur et Tanya qui ont toutes les deux un petit sourire rêveur. Elles sont heureuses, elles aussi, de la façon dont les évènements se déroulent.

- Dites les filles, ça vous dit de me donner un coup de main pour leur préparer un cadre idyllique ?

Leurs immenses sourires répondent d’eux-mêmes.
Nous sortons donc toutes les trois, bras dessus, bras dessous, pour installer le décor pour la scène finale de la soirée : une demande en mariage inespérée !


POV Edward (au moment de sa soirée avec Bella)

J’écoutais ma belle avec une attention quelque peu défectueuse, piégé par son regard envoûtant et le mouvement hypnotique de ses lèvres pulpeuses. M’entendre dire inlassablement qu’elle m’aime plus que tout flattait mes oreilles, mon cœur et mon ego.
A la fin de ses paroles, je m’aperçus qu’elle m’observait fixement, inquiète, un genou posé au sol et mes mains entre les siennes.

Euh… Il s’est passé quoi, là ? C’est quoi le truc ? J’ai dû rater un passage…

Je me repassais son monologue et me focalisais sur ses dernières paroles et me figeais lorsque je crus en comprendre le sens.

Noooon ! Pas possible !

Le regard de ma Bella se fit craintif tandis que le mien s’écarquillait de surprise.

- Euh… Edward… je ne sais pas si… tu t’en es rendu compte mais… je viens de… je viens de te demander en mariage… euh… une réponse serait la bienvenue…

Je l’attrapais brusquement sous les aisselles et plaquais son corps contre le mien avant de sceller mes lèvres aux siennes, hurlant ma joie à travers des « OUI » tonitruants entre deux baisers.

- OUI ma Bella ! SMACK ! Oh putain OUI ! BIZZ ! Mille fois… SMACK ! OUI… Si tu savais… BIZZZ ! comme je suis heureux… SMACK ! et fier… BIZZZ… que tu m’aies choisi… SLURP ! comme époux… SMACK ! Je t’aime… BIZZZ ! Mon amour.

Je me relevais vivement avec mon ange dans les bras et la fis virevolter dans tous les sens en riant et en sanglotant de joie à la fois. Je n’en revenais pas… Alors que j’attendais depuis plusieurs mois de trouver le moment parfait pour lui demander sa main, Bella m’avait royalement coupé l’herbe sous le pied au cours de cette étonnante soirée. Évidemment, Alice avait vu « le truc » et nous entendîmes des « félicitations ! » braillés de tous côtés.
Connaissant les frangins, j’allais me faire chambrer à coup sûr !
J’emmenai Bella dans la salle de musique du cottage, tout en l’enlaçant étroitement, et une fois dans la pièce, j’attrapai le petit écrin et l’ouvris devant elle.
Un hoquet de stupeur s’échappa de ses lèvres lorsqu’elle vit ce que la petite boîte contenait.

- Mais… quand… comment… pourquoi… que…

Elle ne trouvait plus ses mots et fit un effort incomparable pour m’offrir ses pensées malgré la soif qui la tenaillait.

- Je… je l’ai achetée le soir où… le soir où j’ai dû… te mordre… Je voulais te demander en mariage mais…
- Mais quoi Edward ? Tu hésitais ? Tu n’étais pas sûr ? Tu ne croyais pas en nous ?
- NOOON ! Non Bella ! Bien sûr que non ! C’est juste que… avec ta transformation… les entraînements… les soucis… ton père… je ne trouvais pas le bon moment… Je voulais que tout soit parfait, comme l’ont été cette soirée et cette nuit… Je t’aime ma Bella… N’en doute jamais…

Je glissais délicatement le saphir à son annulaire et le regard de ma Bella s’enflamma.
Elle agrippa le col de ma chemise et me fit pencher pour attaquer mes lèvres. Sa langue caressait tendrement la mienne et ses mains s’aventurèrent sous ma chemise, une fois les boutons arrachés.
Nous nous effeuillions mutuellement tout en allant vers la chambre, éparpillant nos vêtements dans chaque pièce que nous traversions, Petits Poucets lubriques des temps modernes.
Il ne resta bientôt plus que son corps nu, uniquement vêtu de sa bague, et le mien.
Bella me poussa sur le lit et rampa sur mon corps frissonnant d’envie, ses seins pressés contre mon torse, ses mains glissant inlassablement sur mes flancs et sa petite chatte bouillonnante et humide de désir taquinant mon gland eurent bientôt raison de moi et je fus incapable de me retenir de gémir de plaisir lorsque ma douce s’empala lentement sur mon chibre.

- Oh Bella… Humm oui !

Nous laissions nos corps parler d’eux-mêmes, ils se répondaient en parfaite harmonie, naviguant dans un océan de volupté et de langueur.
Mon bassin se soulevait au rythme qu’elle m’imposait, tantôt lent et sensuel, tantôt fougueux et passionné, sa délicieuse petite chatte avalant gloutonnement ma queue avant de la recracher et de l’avaler, encore et encore…
La tête rejetée en arrière et la bouche entrouverte, sensuelle, ses mains caressant ses seins et taquinant ses tétons pendant que mon pouce s’activait sur son clitoris gorgé de plaisir, son bassin ondulant frénétiquement sur ma queue, Bella était absolument magnifique. Divine. La beauté et la sensualité à l’état pur.
Au moment où un orgasme puissant, dévastateur, nous frappa et que nous hurlions simultanément notre plaisir, une douleur abominable me terrassa et mes cris de plaisir se muèrent en hurlements de souffrance.
Intolérable. J’avais l’impression de me consumer sur place, d’être ravagé de l’intérieur par une multitude de langues de feu. La brûlure du venin n’était rien comparée à cette épouvantable torture. Je sentais à peine la fraîcheur des mains et des lèvres de Bella sur mon corps, en proie aux flammes de l’Enfer.

- Edward ! Edward ! Qu’est-ce qu’il t’arrive ? Dis-moi !

J’étais incapable de répondre à mon ange, muselé par la douleur. Cette souffrance était des plus atroces. J’écoutais, impuissant, les sanglots de ma belle, perdu dans les limbes de la douleur.
Un choc violent.
Des cris.
La souffrance s’arrêta subitement.
J’ouvris les yeux et découvris Félix, au pied de notre lit, le regard vibrant de dégoût et de colère, accompagné des Jumeaux Diaboliques, Jane et Alec, qui se trouvait en retrait, tête basse, par rapport aux deux autres.
Je compris instantanément que toute cette souffrance provenait de Jane, et en voyant la colère et la frustration contenues dans son regard assassin, je réalisais que ma Bella m’avait englobé sous son bouclier.
Mon besoin de la protéger se réveilla immédiatement, et d’un geste vif, j’agrippai ma Bella et la fis passer dans mon dos afin d’éloigner son corps nu du regard pervers et sadique des deux vampires, Alec restant obstinément tête baissée, les yeux rivés au sol, dans une posture de soumission totale.
Félix plongea son regard dans le mien et je ne pus m’empêcher de gronder doucement en signe d’avertissement. Il ne touchera pas à MA Bella…

- Bien le bonjour, Cullen ! … Hmpf… on ne peut pas dire que la politesse t’étouffe. Le minimum de correction serait de me répondre et de me souhaiter également un bon jour !
- C’est toi qui parle de politesse et de correction ? Non mais je rêve ! On ne t’a jamais appris que ça ne se fait pas d’entrer chez les gens sans frapper ?
- Parce que tu m’aurais ouvert, peut-être ? Ah ! Tiens, tiens, tiens… je vois que tu as fait un excellent travail avec ma Beauté… sa transformation l’a sublimée, elle est réellement magnifique, bien que cette diète ridicule ne lui sied point au regard ! Elle serait bien plus belle avec de magnifiques yeux pourpres… Et son don, quelle merveille ! Un bouclier si je ne m’abuse ?
- Qu’est-ce que tu fous ici ?

Je sentais Bella frémir de colère dans mon dos et vis Félix hausser un sourcil en affichant un sourire conquérant.

- Je viens reprendre ce qui est à moi et…
- Je ne t’appartiens pas ! Hurla Bella, la rage au corps.
- Tais-toi ! Ton cas est déjà suffisamment désespéré pour le moment, pas la peine d’en rajouter ! Et avant que…

Félix fut interrompu par l’explosion de la baie vitrée ; Jacob et Tanya venaient à la rescousse.
Bella et moi nous jetâmes sur Félix pendant que Jake et Tanya s’attaquaient à Jane, mais nous fûmes rapidement submergés par nos ennemis puisque cinq vampires inconnus au bataillon arrivaient pour prêter main forte à Félix.
Tanya fut propulsée par un violent coup de poing de l’un des nouveaux venus et l’énorme loup brun-roux se jeta sur lui avant de s’écrouler au sol, frappé par le don de Jane.
Je me jetais sur ce petit démon et allais lui arracher un bras lorsque Félix me maintint par le cou.

- Je te conseille de te calmer et d’obéir, Cullen… tu ne voudrais pas que ta famille et tes amis soient victimes d’un malencontreux… accident, n’est ce pas ? Tu ne t’es donc pas demandé pourquoi ils n’étaient toujours pas là, hein ? Ils sont tous sous la coupe d’Alec, ils sont privés de leurs sens… Ces deux idiots ici présents ne devaient simplement pas être à la villa, dommage pour eux… Un seul geste, Cullen, et j’appelle le garde qui est actuellement avec les tiens. Il se fera une joie de les démembrer et de les brûler… Ce qui serait une bonne chose soit dit en passant. Vous autres, Cullen et Dénali, êtes une gangrène pour notre race. Vous ne méritez pas l’honneur suprême d’être nommés « vampires » !

Il me relâcha et me jeta au sol, loin de Bella. Ma douce se rua sur moi et m’embrassa désespérément, violemment. Jacob et Tanya, protégés par le don de Bella, grognaient méchamment en vrillant leurs regards noirs sur les huit vampires qui nous faisaient face.
Félix claqua des doigts et pointa son index au sol.

- Isabella ! Ici !
- Va te faire foutre !

Il se jeta sur elle et la gifla brutalement ; je me ruais sur lui, agrippai son pied et le jetai à travers ce qu’il restait de baie vitrée.
Il revint immédiatement dans la mêlée, les pieds et les poings volèrent entre nous, et après plusieurs coups passablement vicieux de sa part, je me retrouvais sur le ventre, cloué au sol, les deux bras maintenus en arrière, la tête redressée prête à être arrachée, tandis que Bella était maintenue par Jane et deux autres vampires, Tanya et Jacob roués de coups et assommés par les autres.

- Tu as suffisamment abusé de ma Beauté, Cullen. J’ai été plus que généreux avec toi, je t’ai laissé le temps de l’expérimenter. J’espère pour toi que tu en as bien profité parce que tu ne la verras plus. Elle est à moi. A MOI. T’as compris p’tit con ? Allez… maintenant dis « adieu » !

Ma Bella avait le regard horrifié et sa bouche était ouverte en un cri silencieux. Sa soif avait eu raison de son bouclier physique, elle était impuissante, sans défense. Je sentis les tendons de mon cou lâcher, les vertèbres craquer les unes après les autres et je sus qu’il allait me tuer. Je ne regrettais qu’une chose, ne pas avoir eu le temps de faire de ma Bella mon épouse. Plus jamais je ne pourrais poser les mains sur elle… plus jamais je ne pourrais la regarder… et je m’en voulais, je me dégoûtais, sachant à quelle vie ce sadique allait la réduire. Je lui mimais un dernier « je t’aime » du bout des lèvres et attendis la mort, sourire aux lèvres.

- Félix ! NON ! Je t’en supplie ! Hurla désespérément mon ange.
- Et que veux-tu, Isabella ?
- Je t’en supplie, laisse-le tranquille ! Ne le tue pas, par pitié ! Je… je ferai tout ce que tu veux mais épargne-le… épargne-les tous, je t’en supplie ! Sanglota-t-elle.
- Tout ce que je veux… vraiment Isabella ? Et bien soit ! Tu sais très bien ce que je veux…

Brusquement, la pression sur mon cou et la tension dans mes bras s’envolèrent et je vis, horrifié, ma Bella à genou devant lui, la tête baissée et les doigts entrelacés sur son cou. J’essayais de croiser son regard mais ses yeux étaient obstinément rivés au sol.

- Bella… fais pas ça !

Je lançais un regard noir, meurtrier à Félix qui souriait de toutes ses dents.
Ce sale type jubilait, la situation lui plaisait énormément. Voir mon ange à ses pieds et nous faire souffrir le rendait extatique.
Ses pensées étaient abjectes, toutes comme celles de ses acolytes. Les pensées d’Alec m’étonnèrent cependant, le Volturi au don redoutable était désolé, sincèrement désolé, de ce qu’il nous arrivait. Il s’excusait d’avoir privé ma famille et nos amis de leurs sens mais il n’avait apparemment pas le choix. Il me suppliait mentalement de ne pas pousser son « chef » à bout, il m’exhortait au calme. Mais je n’y arrivais pas…
Voir Félix tapoter sur la tête de mon ange, comme si elle était un bon chien-chien qu’on félicite me répugnait. Et elle ne faisait rien.
Ses barrières physiques n’agissaient plus, sa soif la consumait, elle n’était plus protégée.
Et le pire, c’est que Bella se jetait d’elle-même aux pieds de ce malade, acceptant de devenir sa victime consentante.

- Bella ! Je t’en supplie mon amour, fais pas ça !

Je me pris un violent coup à la mâchoire et Félix ricana.

- Ta gueule Cullen ! Elle est à moi ! Tu t’es amusé avec suffisamment longtemps ! Il est grand temps que je récupère mon bien !

Je me pris un second coup… puis un troisième… Au dixième, Bella couina de terreur pour moi.
Félix se tourna vers elle et lui empoigna les cheveux avant de la vriller de son regard carmin envahi par la folie.

- N’aggrave pas ton cas, Beauté… Tu t’es laissée souiller par cette pâle imitation de vampire au point d’oublier que tu es à moi…
- Je ne t’appart…
- SILENCE !

Il la frappa et alors que je me jetais sur lui, je fus immobilisé par Alec, privé de mon toucher, de mes mouvements. Félix braillait de façon incohérente, la voix voilée par sa folie, puis il se reprit légèrement.

- Je vais devoir te purifier et te rééduquer, Isabella. Tu vas me faire le plaisir d’oublier ces pathétiques Cullen et te mettre dans le crâne une bonne fois pour toutes que tu es à moi. A MOI !

Cloué au sol, privé de l’usage de mes membres et abruti par les pensées abjectes de Félix, j’assistais, totalement impuissant, à l’enlèvement de mon ange. Alors que ce bâtard la forçait à se relever, les pensées de ma Bella me parvinrent au prix d’un immense effort.

Je t’en supplie Edward… il n’y a pas d’autre solution pour l’instant… pense à ta famille… à nos amis… je n’ai pas d’autre choix ! Je suis à toi, mon amour… à toi et à personne d’autre… je t’aime… depuis toujours et pour toujours. J’ai confiance en toi et en Alice, elle me retrouvera… tu me retrouveras. Je ne sais pas encore quand, ni comment, mais je reviendrais, Edward, je te le promets… je refuse que tu te laisses abattre. Pense à ta famille, pense à moi ! Je ne pourrais pas me battre en sachant que tu te laisses aller… sois fort ! Pour moi… pour nous… n’oublie jamais à quel point je t’aime mon cœur… n’oublie jamais ! Je te reviendrais… le plus vite possible… je te le promets. Je t’aime !

Je me mis à sangloter comme un gosse en comprenant que Bella se sacrifiait pour le bien-être de ma famille et ne pus qu’assister, impuissant, alors que Jane habillait ma compagne d’un jeans et d’un vieux tee-shirt.
Félix claqua des doigts au nez d’Alec et ce dernier lui tendit un épais collier en titane, constellé d’éclats de diamant, que Félix s’empressa de mettre au cou de mon ange avant de se tourner vers moi, le regard victorieux. Il prit délicatement la main de Bella entre les siennes et ôta le saphir qui scintillait à son doigt avant de refermer sa main sur le bijou et de la rouvrir sous mon nez, une fois la bague réduite en poussière.

- Elle n’en aura plus besoin, désormais. Mon collier lui suffit. En tous cas, je vais avoir beaucoup de boulot pour rattraper tes conneries Cullen… Faire de mon Isabella un vrai vampire sera un réel plaisir. Retourne jouer avec les lapins et amuses-toi bien avec, moi je te garantis que je vais prendre mon pied avec mon jouet, maintenant que je l’ai récupéré… Bye-bye Cullen !

Cloué au sol, incapable de bouger le moindre doigt, je regardais l’ordure et ses sbires emporter ma fiancée sans pouvoir m’interposer.
Alors qu’il l’emmenait vers la porte, Bella se défit de son emprise et se jeta sur moi, m’embrassant une dernière fois en me submergeant de son amour.
Je voulais hurler, me battre, pleurer, j’en étais incapable. Je ne pouvais rien faire pour protéger ma moitié et les empêcher de l’emmener.
Je ne recevais que des flots incohérents de pensées, certaines sadiques, d’autres monstrueuses, ignobles… mais ce qui me sidéra fut la promesse silencieuse d’Alec de s’occuper de mon ange du mieux qu’il le pourrait, sans aucune arrière pensée.
Puis brusquement, alors qu’ils avaient tous disparu, je recouvrai l’usage de mon corps et de mes sens, tout comme Jacob et Tanya. La pauvre se remettait l’épaule en place, quant à son compagnon, sa respiration était difficile et sifflante à cause de quelques côtes cassées et fêlées.
Je ne pus que hurler de désespoir, bramant inlassablement son prénom avant de me ressaisir et d’enfiler un jeans. Je sortis en trombe du cottage, suivi de Tanya et bientôt rejoint par ma famille, mais je ne les voyais pas. Je suivis les différentes fragrances qui se dirigeaient vers la Push ; craignant le pire, j’accélérai ma cadence et arrivai aux falaises.
C’était fini.
Je ne pouvais plus la retrouver.
Ils avaient plongé, effaçant toute trace possible. Je m’écroulais à genoux…

- BELLAAAAAAAAAAAAA !

… avant de me laisser envahir par le néant.
Je fus à peine conscient des bras d’Emmett qui se refermaient délicatement sur moi, m’emportant je ne sais où. La villa probablement. Enfin je crois.
Tout le monde me tapotait la tête ou le bras, me murmurant des « ça va aller »… « elle est forte »… « tout finira bien »… et je n’avais pas besoin d’avoir le don de Jasper pour flairer leur pitié et leur tristesse. Je n’en pouvais plus. Toute cette pitié qui dégoulinait d’eux m'insupportait.
Des images d’une noirceur sans nom, viles peuplaient mes pensées. J’avais eu droit à l’intégralité de ses fantasmes, je savais parfaitement ce qu’il avait l’intention de lui faire subir et c’était à vomir.
Bella n’était pas aussi forte que ce que tout le monde croyait, elle était affaiblie par la soif, par la disparition de son père et elle ne s’en remettra jamais. Pas après ce qu’il lui réservait… C’était de ma faute… je n’avais pas pu la protéger…
Alice se fustigeait de ne pas avoir « vu ». Une partie de moi lui en voulait à mort, l’autre se rendait bien compte qu’elle n’y était pour rien, son don pouvait aisément être contourné lorsqu’on savait comment il fonctionnait.
Ils étaient tous abattus par l’enlèvement de Bella, que ce soit ma famille, les Dénali, le clan d’Amun, la Meute. Moi, je n’étais plus rien.
Sans elle, ça n’en vaut plus la peine.
Je n’étais plus qu’une coquille vide. Un corps sans âme.
J’entraperçus Eléazar du coin de l’œil composer un numéro de téléphone ; vu l’indicatif, il appelait l’étranger.
Sa grosse voix chaude et profonde s’éleva dans le silence religieux qui peuplait le salon.

- Allo ! C’est moi. J’ai de mauvaises nouvelles… la petite vient d’être enlevée par Félix, accompagné des Jumeaux… d’accord… à ce soir.

Alice hoqueta de stupeur, mais plutôt que de pénétrer ses pensées, je me murais dans les miennes, souhaitant faire abstraction de tout ce qui m’entourait.
Elle est partie. Je ne suis plus rien…
Le néant.
Voilà ce dont je suis fait.
Je suis vide.
Je n’ai plus d’âme, plus de cœur, je suis anéanti.
Ma précieuse moitié m’a été arrachée.
Je n’y arriverai pas sans elle.
Je ne peux pas. Je ne peux plus.
Je n’arrive pas à comprendre comment une aussi parfaite nuit a pu se terminer en un pareil carnage au petit matin.
Les uns se succèdent aux autres, essayant de me sortir de ma torpeur.
Je ne veux pas, je ne veux plus.
Elle me manque !
Tellement que ça me tue.
La journée défile lentement. Très lentement, trop lentement. C’est atroce.
Chaque seconde passée loin d’elle n’est qu’agonie.
Son absence me tue un peu plus chaque minute, et masochiste que je suis, je m’auto-torture en repensant aux abjects desseins de Félix. Comme si j’avais besoin de ça !
J’entends des cris de stupeur ; je m’en moque éperdument.
Une main froide se saisit délicatement de la mienne et toute mon existence défile devant mes yeux, comme un film.
Lorsque mes souvenirs d’avec Bella, humaine et vampire, remontent à la surface, je souhaite qu’on m’arrache le cœur.
La souffrance est intolérable.
Je préférerais subir mille fois la brûlure du venin que subir à nouveau les derniers évènements.
Mon amour me manque terriblement. J’ai peur de ne jamais la revoir…

- Elle t’a promis de revenir, jeune Edward, tu dois lui faire confiance.

Je connais cette voix, je l’ai déjà entendue, il y a bien longtemps.
Je lève les yeux, croyant rêver, et en arrive à me pincer pour vérifier. Non, c’est bien réel.
Aro, l’un des trois frères en charge du monde vampirique, est accroupi devant moi, affichant un visage empreint d’une sollicitude que je ne lui connaissais pas. A ses côtés se tient son frère Marcus, dont le regard bouillant de compassion me vrille.
Je ne comprends pas. Que font-ils ici ?

Nous désirons apporter notre aide, jeune Edward.

Ben tiens ! Et ça va se chiffrer à combien ? Un empathe, une voyante-voyeuse, un bouclier et un télépathe ?

- Ah ! Ah ! Bien sûr que non, mon garçon ! Je suis peut-être un collectionneur, et vos dons sont particulièrement intéressants, mais je ne souhaite pas déchirer ta famille plus qu’elle ne l’est déjà. Carlisle est un ami très cher qui a besoin d’aide. Cette aide, nous vous l’apporterons au mieux.

Je ne comprends pas, je ne comprends plus.
Les Volturi prêts à offrir gracieusement leurs services ? Mais oui bien sûr ! Et la marmotte, elle met le chocolat dans le papier alu, tout le monde le sait !
De toute façon, je n’ai pas envie de comprendre… Néant. C’est tout ce à quoi j’aspire sans ma Bella. Je me perds dans le vide absolu jusqu’à ce qu’un souvenir passant dans l’esprit de Marcus me ramène à la réalité.

- Pourquoi est-elle dans votre esprit, Marcus ? Pourquoi je la vois se tordre de douleur ? POURQUOI ?

Je me rue sur lui et le secoue violemment.
M’en fous qu’il soit roi, je lui ferai cracher le morceau, quoiqu’il m’en coûte !
Je me retrouve ceinturé par Emmett et Jasper m’abrutit avec une vague de léthargie en m’écartant de Marcus. Carlisle s’énerve et j’en prends pour mon grade.

- Il va falloir te calmer tout de suite, Edward. Te rends-tu compte que tu viens d’attaquer l’un des rois ? Tu veux que toute la famille soit décimée ? Je sais que ce que tu traverses est éprouvant mais…
- Tu sais ? TU SAIS ? Non, tu ne sais rien, Carlisle ! Ta femme est là, elle ! Tu peux la serrer dans tes bras ou simplement la voir ! Tu n’as pas été obligé d’assister à son humiliation et à son passage à tabac sans pouvoir agir ! T’as pas été obligé d’entendre les fantasmes sadiques et pervers qu’il nourrissait ! On ne t’a pas arraché ta femme alors ne me dis pas que tu sais !
- Bella est tout de même ma fille ! Ta famille a perdu une sœur, nos amis une personne chère ! Ressaisis-toi, bon sang ! Aro, Marcus, excusez-le, il n’a plus toute sa tête…
- Je sais cher ami. J’ai vu ce par quoi il est passé… J’en suis sincèrement désolé pour toi, jeune homme. J’en suis d’autant plus affligé lorsque je sais qui a fomenté cela. J’en ai honte, tu ne peux imaginer à quel point jeune Edward.

Ses pensées ne sont que continuité de ses paroles, il est réellement mortifié et écœuré par le comportement outrageux et dangereux de Félix, qu’il considérait presque comme un fils.
Une nouvelle image de ma Bella humaine, agonisante, se tordant de douleur auprès d’un corps me ramène à la réalité.

- Marcus… Pourquoi avez-vous ces images en tête ? Expliquez-moi s’il vous plait ! J’ai besoin… nous avons besoin de savoir !
- Savoir quoi, Edward ? Je ne comprends pas fils. De quoi parles-tu ? Demande mon père en posant une main sur mon épaule.
- Je… je n’arrête pas de voir des souvenirs… ça concerne Bella… elle se tord de douleur auprès du corps de sa mère… C’est la nuit où…
- La nuit où nous l’avons trouvée, battue et violentée, le soir où sa mère est morte par la folie de l’un des nôtres. M’interrompit Marcus avant de poursuivre.
… Ce soir-là, nous devions, Aro et moi, rencontrer Eléazar au sujet d’un jeune vampire qui n’arrivait pas à comprendre son don. Nous discutions de cela lorsque nous avons senti l’odeur du sang humain. Frais… chaud… puis une odeur de vampire, un vampire que nous connaissions qui plus est, et des cris de douleur. Lorsque nous sommes arrivés sur place, Félix venait de relâcher la jeune Isabella avant de s’enfuir. Nous ne pouvions pas le rattraper et laisser le fouillis qu’il avait causé tel quel. Deux choses nous ont frappées chez cette jeune fille. Tout d’abord, Aro ne pouvait pas la… déchiffrer. Eléazar a confirmé qu’elle avait un talent exceptionnel, bien que latent de par son humanité. Nous aurions dû laisser la transformation se faire ou alors la tuer, mais lorsque j’ai vu son visage et qu’elle a ouvert les yeux, plongeant son regard agonisant dans le mien, je n’ai pas pu m’en empêcher, je devais la sauver…
- Pourquoi ? Demandai-je, sceptique.
- Ma Dydime… Cette jeune fille est le portrait craché de ma tendre Dydime. Je ne pouvais pas la laisser ainsi et… elle était si jeune ! J’ai donc pris la décision d’aspirer le venin et d’empêcher la métamorphose.
- Mais… pourquoi ?
- Parce que, jeune Edward, après le cauchemar que cette pauvre fille venait de vivre, il y avait de fortes chances pour qu’elle soit incontrôlable à son réveil et là, nous aurions dû mettre fin à son existence. Chose que je n’aurais jamais pu faire, à cause de ma Dydime.
- S’cusez moi, mais c’est qui Dydime ? Demanda Jacob en s’approchant des deux rois, le corps parcouru de frissons de se trouver face à deux vampires suivant le régime traditionnel.

Marcus eut un bref rictus de dégoût tandis qu’Aro pouffait doucement.

- A quand remonte votre dernier bain, jeune homme ? Pardonnez-moi de vous dire cela, mais vous empestez le chien mouillé, c’est épouvantable !
- Eeeeh ! J’vous permets pas ! S’énerva Jake.

Aro posa une main sur l’épaule de Marcus.

- Ne t’inquiète pas, mon frère. Cette odeur vient seulement de la… nature… particulière de ce jeune homme. Il est un loup…
- Loup ? Loup-garou ? Mais je pensais…
- Non ! Il n’a rien à voir avec les Enfants de la Lune, Marcus, ne t’en fais pas. D’après ce que j’ai pu en voir, c’est le résultat d’une… anomalie génétique. Ce jeune homme est capable de se transformer à volonté, de jour comme de nuit. Il n’a rien à voir avec… eux. Expliqua Aro.

Marcus, lui, observait Jacob avec de la haine évidente dans le regard. Afin de calmer les esprits, Aro poursuivit.

- Pour en revenir à ta question, jeune loup, Dydime était l’épouse adorée de mon frère. Son « imprégnée » comme tu dirais. Un jour, alors que nous partions en guerre, nous avions envoyé nos compagnes, mes frères et moi, en lieu sûr. Félix, qui vénérait le sol que foulait Dydime, était chargé de leur protection. Malheureusement, ils ont été pris en embuscade et attaqués par des Enfants de la Lune, et cette malheureuse Dydime n’a pas survécu. Après ce drame, et les multiples demandes de notre frère Caïus qui avait failli périr sous les crocs de deux Enfants de la Lune, nous avons éradiqué les derniers loups-garous de la surface de la Terre. Ils étaient bien trop instables et surtout dangereux. A la fois pour le Secret, mais aussi pour les humains.

Ben tiens ! Une sangsue a le droit de vivre, mais pas un loup-garou ? Dangereux pour les humains ? Quelle blague !

- Ce n’est pas une blague, Jacob, crois-moi. La Meute et toi n’avez strictement rien en commun avec de véritables loups-garous. Vous êtes capables de penser rationnellement une fois sous votre forme lupine, les Enfants de la Lune non. As-tu déjà entendu parler d’une vieille légende française, la « Bête du Gévaudan » ? Les Volturi ont eu bien du mal pour que ce carnage ne reste qu’une légende aux yeux des humains.
C’était un véritable Enfant de la Lune, le responsable. Il a massacré des hommes, des femmes, par centaines, uniquement parce qu’il était incapable de se contrôler. Il poussait même le vice, dans son extrême cruauté, à enlever de jeunes enfants juste avant la pleine lune et à les enfermer avec lui lors de sa mutation. Les loups-garous sont sanguinaires et bien plus dangereux que les vampires pour les humains.

Jacob était choqué par mes paroles, il avait toujours été fier d’être un loup-garou, mais il ne s’imaginait pas à quel point lui et la Meute étaient différents des Enfants de la Lune. Il se frotta le visage à deux mains avant de s’adresser à Marcus d’une voix bourrue.

- Ouais. Bon. D’accord. Mais… tout cela ne nous dit pas pourquoi vous avez épargné Bella ! Et surtout pourquoi vous n’avez pas tué le fils de pute qui l’a agressée ! S’énerva-t-il.
- Je te l’ai déjà dit, jeune loup. Dydime…

Je vis alors dans son esprit une image de sa compagne, au temps où elle était encore humaine, puis vampire, et fus frappé par la ressemblance entre Dydime et Bella. La même taille, le même visage, les mêmes traits, les mêmes mimiques… des sœurs jumelles avec quelques siècles d’écart. Mais là où Bella avait les yeux chocolat et les cheveux bruns, Dydime les avait noirs. La seule différence entre ces deux femmes. Je pouvais aisément comprendre pourquoi Marcus avait été si troublé…
Je ne m’étais pas aperçu que pendant ce laps de temps où je différenciais ma compagne de feue la sienne, Marcus avait pris possession de l’un des ordinateurs portables du salon. Il se connecta à Internet, alla dans une zone de stockage sécurisée, passa les différents pare-feu qui étaient intégrés puis composa un code d’accès. Enfin, il atterrit sur une galerie de tableaux, ceux du château de Volterra, si je ne m’abuse, et cliqua sur une vignette qu’il montra à tous.
Un portrait représentant son ancienne épouse.
De nombreux hoquets et halètements de stupeur résonnèrent de toute part lorsque les personnes présentes firent la relation avec le portrait affiché sur l’écran de l’ordinateur.

- Mais… c’est Bella ! S’exclama Jacob, le doigt pointé sur l’écran.

Le regard de Marcus était mélancolique lorsqu’il reprit la parole.

- C’est ma Dydime. Comprends-tu maintenant la raison pour laquelle j’ai épargné votre amie, jeune loup ?

Il reposa délicatement l’ordinateur avant de se rasseoir, puis pouffa doucement en s’apercevant que tout le monde était suspendu à ses lèvres.
Accrochant mon regard à celui du souverain, j’essayais de lui témoigner toute ma gratitude pour avoir sauvé ma Bella. Si j’avais la chance de la connaître, c’était grâce à lui.
Il dut apparemment comprendre ce qu’il lisait dans mes yeux car il me sourit tristement en hochant la tête puis il souffla lourdement.

- Tu me remercieras beaucoup moins lorsque tu auras tous les éléments en main, jeune Edward… Pour en revenir à la question de notre jeune ami loup ici présent, nous n’avons pas attrapé Félix ce soir-là car il fallait effacer toutes les traces de son passage. Les techniques scientifiques ont permis aux humains de faire de grandes avancées, dans tous les domaines, et parfois, l’un de nos congénères se laisse un peu… entraîner dirais-je. Il faut donc « nettoyer » derrière lui si nous voulons rester ce que nous sommes aujourd’hui : une légende. Nous nous sommes donc occupés de la jeune Isabella en aspirant le venin, nous avons fabriqué de faux indices puis avons ensuite appelé les secours. Comme vous le savez aujourd’hui, nous lui avons également révélé notre existence par écrit, avec un ultimatum à la clef…
- Mais elle aurait pu en parler aux humains ! S’énerva Rosalie.
- Au risque de devoir passer sa vie enfermée dans un asile d’aliénés ? Non. Nous nous doutions qu’elle ne parlerait à personne de nos révélations, puis de toute façon, Eléazar devait la surveiller. Je peux vous dire que nous avons eu une sacrée surprise lorsque nous avons appris qu’elle était ta compagne, jeune Edward !
- Mouais, j’veux bien croire… un don en moins pour la collection !
- Ne parle pas de ce que tu ne connais pas, jeune Rosalie. Le talent d’Isabella est peut-être redoutable et nous aurions grandement apprécié l’avoir à Volterra, mais je préfère mille fois savoir qu’elle est heureuse, auprès de son compagnon d’éternité. Elle a beau ne pas être physiquement avec nous, je ressens parfaitement le puissant lien qui l’unit à ton frère.

Jacob se leva brusquement et se planta, droit comme un I, devant Marcus.

- Bon, c’est bien beau toutes ces parlottes, mais ça nous dit toujours pas pourquoi vous n’avez pas achevé ce boucher ! Ça fait un bail qu’il nuit au « Secret », qu’il nuit tout court, d’ailleurs. C’est pas votre boulot de vous occuper des ennuis ?

Marcus soupira longuement puis leva son regard envahi de tristesse et de remords dans le mien avant de se tourner vers Jake.

- Dydime…
- Quoi Dydime ! S’énerva le Quileute.
- C’est à cause de Dydime qu’il n’a pas été tué et a toujours été pardonné de ses crises de folie et ses… boucheries. Il faut également reconnaître que Volterra serait tombée depuis bien longtemps si Félix n’avait pas été là…

Je ne comprenais plus rien. Qu’avait donc à Voir Dydime et Félix ? Et Bella ? Pourquoi ce sauvage en avait-il ainsi après elle ? Je ne parvenais pas à comprendre…

- Excusez-moi Marcus, mais quel est le rapport entre Félix et Dydime ?
- Ils… ils étaient fiancés… Lâcha Marcus dans un souffle.

Des cris de stupéfaction envahirent le silence qui régnait dans le salon jusqu’à présent ; Marcus poursuivit donc ses explications.

- Ce qu’il faut que vous sachiez, c’est qu’à l’époque à laquelle ils étaient humains, au XV ème siècle, il était très fréquent de fiancer les enfants, parfois même dès leur naissance. Cela permettait d’agrandir les terres, les fiefs, de créer des liens entre deux familles puissantes etc… Félix et Dydime étaient les premiers nés de deux riches exploitants agricoles. Leurs pères ont voulu s’associer afin de s’enrichir plus vite, et quoi de mieux pour cela que d’unir leurs familles ! Félix et Dydime ont ainsi été fiancés, avant même leur naissance. Ils ont grandi ensemble. Félix était prêt à tout pour que Dydime lui accorde autre chose que son amitié. Pour lui, comme elle lui était promise, il était normal qu’elle l’aime. Mais Dydime… Dydime était une rebelle dans l’âme. Elle ne voulait pas d’un mariage arrangé. Elle aimait sincèrement Félix, mais pas de la façon dont lui, le souhaitait. Deux semaines avant leur mariage, Félix a croisé la route d’un vampire. Caïus passait par-là et il a empêché Félix de servir de repas lorsqu’il a vu le jeune humain se débattre comme un beau diable entre les mains de son prédateur. Notre frère a été très impressionné par son caractère vindicatif et l’a donc ramené à Volterra. A son réveil, Félix était enragé lorsque nous lui avons expliqué ce qu’il était désormais. Il disait devoir retrouver sa fiancée, la plus belle des Italiennes, qu’il devait rejoindre la sienne. Il s’est tu pendant dix jours puis il s’est entraîné… battu… il a contrôlé sa soif… et six mois après, il a disparu. Une nuit. Avant de revenir au petit matin avec Dydime agonisant dans ses bras. Il l’avait mordue. Elle était sienne et il ne voulait pas l’abandonner. Lorsqu’elle s’est éveillée de son calvaire et que nos regards se sont croisés, nous avons immédiatement su, Dydime et moi, que nous étions fait l’un pour l’autre. Les deux moitiés d’un même tout. Je lui ai fait la cour, ce que Félix n’a pas du tout digéré. Elle était à lui et à personne d’autre ! Mais lorsque Dydime lui a fait comprendre qu’il n’était rien d’autre qu’un ami, un frère pour elle, il a été anéanti. Il a bien tenté de la rendre jalouse en flirtant et couchant avec toutes les femelles qui passaient à sa portée, puis voyant que Dydime avait une absence totale de réaction, il a fini par comprendre et par prendre son rôle d’ami, de frère au sérieux. Il est devenu son confident, son protecteur et m’a supplié de tout faire pour la rendre heureuse. Félix… il ne s’est jamais remis de la mort de ma Dydime… tout comme moi… Puis… il a commencé à devenir fou… Sa dernière once d’humanité a disparu en même temps que ma Dydime. C’est là, que la légende du « Fléau » est née…

J’écoutais les paroles de Marcus tout en me remémorant celles de Félix et eus un haut-le-cœur lorsque je fis certaines déductions. Il avait déjà perdu Dydime, il fera tout pour garder Bella, quitte à tuer tout ce qui se trouve sur son passage…

- Oui jeune Edward, je le pense également. Souffla Aro d’une voix tendue.

Je ne m’étais pas aperçu qu’il avait une main posée sur mon épaule.

- Vous parlez d’quoi ? Demanda Jacob, un sourcil relevé. Aro se tourna vers lui.
- Nous pensons que… Félix a jeté son dévolu sur la jeune Isabella à cause de son extraordinaire ressemblance avec notre regrettée Dydime. Comme il n’a pas pu avoir celle qui lui était promise, il se rabat sur la seconde solution.
- Mais merde ! S’il l’aimait réellement cette Dydime, il ne devrait rien en avoir à s’couer de Bells !
- Je n’en suis pas certain, jeune loup, mais je pencherai plutôt sur le fait qu’il aimait l’idée que Dydime lui appartienne. A cette époque, une femme était la propriété de son époux et Dydime aurait dû, selon toute logique, appartenir à Félix. Les choses ne sont cependant pas passées comme il l’espérait et l’imaginait. A mon humble avis, son obsession pour votre amie Bella qu’il a, fut un temps, soumis à sa volonté, et son besoin de possession sont liés.
- Alors on fait quoi ? On attend qu’il la dresse et la rééduque comme il nous l’a dit ? S’énerva Jake.
- Pour cela, il faudrait d’abord la retrouver, ce qui ne sera pas une mince affaire ! Crois-tu que nous sommes venus ici pour rester les bras ballants ? Répondit Aro avec hargne.

Au même instant, son téléphone portable sonna.

- Oui Démétri ?
- Bonjour Maître. J’ai fait ce que vous m’aviez demandé.
- Et ?
- Je n’arrive pas à trouver la trace de Jane, Alec ou encore Félix, c’est trop flou. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’ils sont entourés par de la neige, des forêts et des montagnes.
- Mais comment cela est-il possible, très cher ?
- Je pense que le bouclier de cette jeune femme brouille mes sens. Je n’ai jamais été confronté à un tel phénomène. Je suis désolé de ne pas pouvoir vous aider dans votre recherche, Maître.
- Ce n’est rien, mon jeune ami. Tu as fait ce que tu pouvais… Tu peux reprendre ta précédente mission, mais je te demanderai, dans ce cas, de me faire un rapport matin et soir sur l’évolution de tes recherches. Me suis-je bien fait comprendre ?
- Oui Maître, parfaitement.
- Bien, bien. Je te souhaite le bon jour, Démétri.
- Vous aussi, Maître, passez une bonne journée. Au revoir.

Aro raccrocha, frustré par sa conversation.

- Et bien… il semblerait que retrouver votre amie sera des plus difficiles.
- Ben pourquoi ? Demanda Jacob.
- Lorsque mon cher ami Eléazar nous a prévenu de l’enlèvement de la jeune Isabella, j’ai immédiatement mis Démétri sur l’affaire. Il est le traqueur le plus talentueux que le monde ait porté !
- Ouais ben il ne doit pas être si bon que ça s’il n’est pas foutu de les trouver ! Répliqua Jacob d’un air dédaigneux.
- Détrompes-toi, jeune loup, Démétri est le meilleur dans son domaine. Nous autres, Volturi, nous entourons de l’élite vampirique. En fait, Démétri est non seulement capable de capter l’odeur d’une personne, mais il en perçoit également l’essence spirituelle. Votre jeune amie brouille son don, c’est pourquoi il ne peut la localiser…
- Mais nous on peut ! Intervint Sam qui venait d’arriver.
- Ta Meute et toi avez peut-être un sacré flair, jeune loup, mais vous pourrez vous acharnez à retourner la planète que vous ne les retrouverez pas. Félix a su comment s’entourer comme il le fallait. Contra Marcus, de sa voix sage et posée.
- Comment cela ?
- Et bien… il semblerait que notre ami Afton ait retourné sa veste…
- Mais… en quoi Afton a quelque chose à voir avec tout ça ? C’est juste un gringalet qui pleure sa mère dans toutes les langues dès qu’on éternue à ses côtés ! S’exclama Emmett, lassé par toutes ces paroles inutiles.
- Afton a depuis peu développé son pouvoir…
- Mais Afton en est dépourvu ! Je l’aurai su s’il possédait un quelconque talent ! Intervint Eléazar, un tant soit peu vexé que les deux rois n’aient pas confiance en son jugement.
- Et la raison en est simple, mon cher ami. Afton est, malgré son fumet, indétectable. Il est même capable d’étendre cette particularité à tout un groupe. Je ne sais pas réellement comment fonctionne son don, mais… oui, il est à même de créer une sorte d’écran empêchant qu’on le détecte. C’est pour cela que vous ne retrouverez pas la jeune Isabella, chers Quileute, il a déjà dû encercler leurs odeurs.

Aro se leva, hargneux, et se mit à faire les cents pas.

- Arg ! Comme si une rébellion n’était pas suffisante ! Il a fallu que ce petit saligaud de Félix entraîne Afton, Jane et Alec dans son sillage ! Il ne manquerait plus qu’il rallie Sieg…
- Siegfried ?
- D’où connais-tu ce nom, jeune Edward ? Me demanda Aro d’une voix menaçante mais également teintée de crainte.
- Il… Félix n’arrêtait pas de penser à ce nom lorsqu’il parlait de rééducation.

Un sentiment de malaise fort puissant s’empara d’Eléazar et des deux Volturi qui s’échangeaient des regards inquiets.

- Qu’est-ce que vous ne nous dites pas ?
- Siegfried possède un don particulièrement intéressant. Il est capable de… manipuler les souvenirs à sa guise. Il pourrait parfaitement faire en sorte que Carlisle cesse sa diète ridicule ! Je suis désolé mon cher ami, mais reconnais que ton régime est pitoyable. Bref. Siegfried pourrait ôter de l’esprit de ton père toutes ses années de diète animale et lui implanter dans l’esprit de vrais-faux souvenirs dans lesquels Carlisle se verrait boire à même la gorge d’une jeune pucelle. Siegfried a un don particulièrement redoutable, dangereux entre de mauvaises mains. Une arme de première catégorie ! Il façonne les souvenirs, les transforme à volonté au point où tu finis par en oublier ta vie pour croire en celle qu’il t’a concoctée. Il a juste besoin d’avoir un contact visuel et physique avec sa… victime.

Je m’écroulais au sol, vaincu, tout infime espoir balayé de mon esprit. Si jamais ce vampire agissait sur ma Bella, elle ne sera plus jamais mienne, elle m’oubliera…

- Mais je te rassure, jeune homme, ta compagne, quoiqu’elle puisse subir, ne pourra jamais t’oublier. Tu seras à jamais présent dans son âme et son cœur. Ne crains rien, sois toujours assuré de son amour pour toi.
- Mais Aro, si ce… Siegfried… parvient à lui implanter de faux souvenirs ?

Je me lamentais, enfouissant mon visage entre mes mains, l’esprit embrumé par des pensées de plus en plus sombres.

- Cela n’arrivera pas, jeune Edward. Il ne pourra jamais percer son bouclier.
- Mais elle est affaiblie par la soif ! Elle ne tiendra jamais le coup !
- La partie physique de son bouclier est peut-être… défectueuse… à cause de la soif, mais son esprit demeurera inviolable. Ta compagne est toujours… humaine… au plus profond de son être, et c’est cette humanité qui rend son esprit inviolable. Ne t’en fais pas Edward, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour retrouver ta Bella au plus vite.

Je me laissais submerger par une vague d’espoir et de sérénité envoyée par Jasper et me laissais faire sans résister. Je ne devais pas m’abattre et devais croire Aro. Mon père s’approcha de son vieil ami, à la fois surpris et inquiet.

- Mais dis-moi Aro, qu’entendais-tu plus tôt par « rébellion » ?

Aro et Marcus échangèrent un regard puis Aro pris la parole.

- Et bien… disons que… depuis quelques décennies, Caïus nous reproche notre laxisme vis-à-vis des humains. Il souhaiterait que nous passions outre le Secret afin de prendre la place qui nous revient de droit selon lui, gouverner le monde et asservir l’humanité. Nous ne souhaitons pas cela. Cette Terre est celle des hommes, leur passage est si court… et cela tournerait au carnage, à l’anarchie et à la barbarie gratuite si nous nous révélions au grand jour. Tu ne peux t’en souvenir puisque tu n’existais point à ce moment, mais lorsque nous avons destitué Stefan et Vladimir en l’an 1000 avant le Christ, il nous a fallu plus d’un millénaire de travail acharné pour que l’Homme croit en notre légende et non en notre existence. D’ailleurs, lorsque les hommes parlent de vampires, ils pensent « Dracula » et « Transylvanie », parce qu’en leur temps, Vladimir et Stefan n’avaient aucun scrupule à se montrer aux humains. Ils ont d’ailleurs failli en périr puisque les hommes des villages alentours, s’étaient rendus un jour dans leur château pour y mettre le feu. Voilà pourquoi nous tenons absolument au Secret. L’Homme a peut-être une espérance de vie courte, il n’en demeure pas moins intelligent et est capable de trouver maints stratagèmes pour venir à bout de notre race, surtout avec toutes les avancées scientifiques et technologiques qu’ils ont connu ce dernier siècle. Pour en revenir à Caïus, disons que nous le surveillons de très près, nous craignons qu’il exhorte Félix à la Révolution Vampirique. Si, de plus, il mettait la main sur la jeune Isabella et trouvait un moyen de pression pour la contraindre à obéir, Volterra tomberait à coup sûr. C’est à cela que s’occupe Démétri : surveiller Caïus et traquer Siegfried.
- Bah ! Pour un soi-disant traqueur d’exception, il est pas terrible s’il ne l’a pas déjà trouvé ! Railla Jacob.
- Mais qui t’a dit qu’il ne l’avait pas déjà trouvé, jeune loup ? Démétri a déjà mis la main sur Siegfried à vingt-six reprises. Malheureusement, il n’est pas immunisé contre le don de notre ami qui s’amuse à lui planter de drôles d’idées en tête. Oui, Siegfried a un don dangereux ! Et s’il s’allie à Félix, je crains pour la tranquillité de notre monde…
- OH !

Nous nous retournâmes tous vers Alice qui avait les yeux dans le vague, sujette à une vision. Aro sauta sur l’occasion et s’empara de la main de ma sœur, un sourire avide sur les lèvres. Je sursautais en voyant les images qui peuplaient l’esprit de ma sœur.

- Charlie ? Tu en es sûre, Alice ? Demandais-je après avoir reconnu le visage.
- Oui… C’est bien lui ! Je… Oh non !

Je me trouvais à nouveau aspiré par son esprit et découvris Charlie Swan, allongé sur un vieux matelas défoncé dans une pièce lugubre, les yeux rivés sur un vampire enchaîné au mur. Un rayon de soleil se réverbérait sur le visage du vampire et le Chef Swan souriait, attendri. Le vampire releva alors son visage. Bella…

- Alice ! Edward ! Qu’avez-vous ?
- Ch… Ch… Charlie… enfermé avec Be… Bella…
- Vous en êtes sûrs ?
- Certains Carlisle…

Alice se mit à tourner en rond tout en se massant les tempes, puis elle releva subitement son visage marqué par l’effroi.

- Oh mon Dieu…
- Quoi Alice ? Qu’as-tu ?
- Edward… tu te souviens des visions que j’avais au tout départ, lorsque Bella est entrée dans nos vies ? Tu te souviens de celle où elle hurlait de douleur, le corps d’un homme à ses pieds ? Je… je crois que c’est en train de se réaliser… Je crois que… Félix attend que Bella soit suffisamment assoiffée avant de la… lâcher sur Charlie…
- Noooon ! Pas ça…

Je me laissais glisser le long du mur, épouvanté par cette idée. Décidément, cette pourriture ne souhaitait qu’une chose : détruire Bella…
Marcus et Aro échangeaient un regard pessimiste que je ne comprenais pas puisqu’ils faisaient en sorte de penser à trop de choses en même temps. Jasper, cependant, ne fut pas dupe de leur petit manège.

- Excusez-moi, mais pourquoi êtes vous donc si soucieux ? Leur demanda-t-il, soupçonneux.
- Pfff… Et bien… Il semblerait que ce cher Félix ne recule devant rien. Il est surtout bien plus machiavélique que nous ne le pensions… Êtes-vous sûrs et certains qu’il s’agit bien du père de la jeune Isabella ?

Alice acquiesça, moi également. C’était bien Charlie. Sûr et certain à 200%. Aro souffla lourdement avant de reprendre.

- Dans ce cas, il faut espérer que cette jeune vampire arrivera à se contrôler, assoiffée ou non. Parce que si ton ancienne vision se réalise, jeune Alice, je crains fort que nous ne perdions cette petite à tout jamais.
- QUOI ? Mais comment ?
- Calmes-toi, Edward ! Ce n’est pas en hurlant à tout va que tu auras tes réponses ! Jasper, aide ton frère à se contrôler s’il te plait. Demanda Carlisle alors qu’une onde de calme s’emparait de mon corps.

Mon père se tourna alors vers Aro et du coin de l’œil, je vis Eléazar pâlir, enfin si une telle chose était possible, il serait plus blanc que blanc.

- Aro, peux-tu nous expliquer en quoi la vieille vision d’Alice ne doit surtout pas se produire ? Je ne comprends pas, et je pense ne pas être le seul.

Aro se tourna alors vers nous et ce fut comme si son visage était d’un coup marqué par tous ces millénaires qu’il avait connus ; il semblait frappé par le poids des ans.

- A cause de son humanité… Nous vous avons expliqué que son esprit demeurerait coûte que coûte protégé par son humanité, qu’il en serait donc inviolable, quoiqu’il arrive mais… mais si elle en arrive à tuer son père, cet acte atroce supprimera toute once d’humanité en elle et son côté vampire prendra le dessus sur sa personnalité. Si son père devait mourir de sa main, son âme sera brisée à jamais et il leur serait facile de pénétrer son esprit afin de la soumettre à leur volonté. Isabella Swan ne sera plus, elle ne sera plus qu’un prédateur, une arme que Félix façonnera à sa guise et qui sait ce qu’il a l’intention de faire par la suite…

jeudi 14 avril 2011

42 - Inespéré

Le cri de Sue Clearwater se répercutait dans la villa, son écho résonnant jusque dans la forêt ; personne n’avait bougé, chacun étant figé dans ses propres questionnements. Alice et moi nous observions, encore chamboulés par la vision qu’elle avait eue et que j’avais suivie en direct. Jasper était plié en deux au sol, en position fœtale, roulé en boule sous le poids de la douleur et du désespoir. Bella fut la première à réagir. Elle se releva brutalement, le visage blême, ses lèvres s’écartèrent doucement et un « papa » presque inaudible s’en échappa. Le temps que je tourne la tête, elle était déjà sortie du bureau et dévalait les escaliers, Carlisle, Alice et moi sur les talons. Jasper nous rejoignit une fois qu’il fut capable de gérer la souffrance qu’il ressentait. J’arrivais dans le salon et y trouvais ma mère ainsi que Carmen, soutenant une Sue effondrée, le visage ruisselant de larmes et la respiration difficile, entrecoupée par de violents sanglots. Un téléphone portable gisait lamentablement à ses pieds et ses mains tremblantes étaient plaquées sur sa bouche, retenant une nausée imaginaire. Bella se rua sur Sue et se mit à la secouer comme un prunier, aboyant une foule de question que la malheureuse femme était bien incapable de comprendre vu l’état actuel des choses.

- Qu’est-ce qu’il se passe ? Pourquoi as-tu crié ainsi ? Qu’est-il arrivé à mon père ? Pourquoi ne m’a-t-on pas appelée ? Pourquoi toi ? Qu’est-ce que tu sais ? Où est papa ? Qu’est-ce que…
- Bella, calmes-toi ! Tu vois bien que Madame Clearwater n’est pas en état de te répondre ! S’écria ma mère en essayant de raisonner ma compagne.

Peine perdue car Bella continuait toujours de malmener Sue, l’abreuvant de centaines de questions et la secouant inlassablement. Je la ceinturais fermement et l’écartais de l’indienne qui manquât tomber une fois relâchée, son petit corps secoué par de violents spasmes et ses jambes tremblantes incapables de soutenir son poids. Carlisle la rattrapa avant qu’elle ne s’effondre puis l’aida à s’asseoir sur le sofa et Carmen revint de la cuisine avec un verre d’eau que mon père fit boire à Sue.
Dans mes bras, Bella se débattait comme un beau diable et il fallut toute ma patience et la persuasion de Jasper pour qu’elle consente à se calmer un minimum et laisse Sue parler.
Mon frère fit agir son don sur l’indienne qui finit par se détendre quelque peu et mon père posa une main compatissante sur son épaule.

- Qui vous a appelé, Sue ? Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous êtes dans cet état ?

Madame Clearwater jeta un bref regard apeuré et triste à Bella avant de souffler profondément et de prendre la parole, regardant mon ange droit dans les yeux. Je la sentis se raidir entre mes bras et renforçais donc ma prise sur son corps, l’enserrant dans une étreinte de fer.

- Je… je suis dé… désolée ma chérie… C… C’était l’a… l’Agent Spécial Ma… Mallone… C’est lui qui… qui dirige l’enquête… sur laquelle Charlie prête… main forte… S’il… s’il m’a appelée… c’est parce que je suis la… la personne à contacter en cas de… en cas de…
- POURQUOI TOI ? C’est moi sa fille ! C’est MOI qui dois être prévenue !

Bella était folle de rage et de chagrin, l’inquiétude la bouffait de l’intérieur, la frustration de ne rien savoir la rendait dingue et j’avais de plus en plus de mal à la maintenir en place.

- Calmes-toi mon ange, je t’en prie ! Laisse-la parler, détends-toi…

J’embrassais doucement sa tempe et jetais un regard impuissant à Jasper qui tentait tant bien que mal de percer les barrières physiques et mentales de Bella. Elle nous étonna tous en se tournant vers lui, l’implorant de son regard envahit de terreur et de souffrance.

- Jazz… s’il te plait… aide-moi… Le supplia-t-elle d’une toute petite voix.

Brusquement, son corps se détendit entre mes bras au point que ses jambes ne supportaient plus son poids, comme si elles avaient pris, à peu de chose près, la consistance d’une guimauve. Bella avait réussi à abaisser suffisamment ses barrières pour que le don de Jasper fonctionne sur elle.
Mon frère ne se le fit pas dire de fois et il bombarda le salon, à présent bondé puisque mes frères et sœurs ainsi que la Meute et les Dénali avaient envahi les lieux, de vagues de calme et de sérénité.
Enfin, Bella se tourna vers Sue et lui fit signe de continuer.

- Charlie… Ton père… il estimait que tu avais subi bien trop d’horreurs en peu de temps… Il ne voulait pas… y ajouter l’appel d’un agent du FBI ou de police au manque de tact flagrant… il ne voulait pas qu’en cas de problèmes… tu sois contactée… C’est pour ça qu’on m’a appelée… Il… Il…

Sue s’effondra à nouveau en larmes, à moitié hystérique malgré le calme que Jasper maintenait artificiellement dans la pièce. Carlisle monta dans son bureau et revint quelques secondes plus tard avec une seringue et un flacon d’anxiolytique qu’il injecta à Madame Clearwater, sous le regard inquisiteur des Quileute.
Au bout de quelques minutes, le calmant fit son effet et Sue reprit la parole.

- Bella… Charlie a eu un accident… ça s’est produit ce matin, très tôt… à l’aube… le soleil se levait à peine… Il a percuté un… un cochon sauvage… il n’a pas su contrôler sa voiture… Il a… Il a foncé dans le lac Michigan… Ils ont… ils ont retrouvé son véhicule mais ils… mais ils… aucune trace de Charlie… le lac est… le lac est grand… ils recherchent… son c… son corps…
- NOOOON ! Pourquoi t’as rien vu Alice ? POURQUOI ?

Bella se débattait entre mes bras tandis qu’Alice éclatait en sanglots secs.

- Bella… mes visions sont subjectives… elles dépendent de ce que les gens décident. Je ne peux voir que les évènements futurs, je…
- Sauf la vision que tu viens d’avoir Alice… Ce n’était pas le futur, apparemment…

Carlisle bondit avant de nous regarder, Alice et moi, avec des yeux ronds.

- Comment cela, Edward ? C’est une vision d’un événement passé qui a rendu Alice léthargique ?
- Et bien… je ne sais pas trop en fait… mais sa vision portait sur Charlie donc…
- Je ne comprends pas ce que tu essayes de nous dire, Edward. Pourrais-tu être plus clair ? Qu’as-tu vu, Alice ? Nous demanda mon père, à la fois inquiet de ce que nous avions vu sur Charlie mais aussi surexcité du changement du don d’Alice.
- D’habitude, mes visions portent sur des évènements qui n’ont pas encore eu lieu et qui pourraient se produire si la personne concernée a une idée précise en tête, commença Alice calmement, par exemple, si Emmett voulait chasser un grizzly demain, je le verrais combattre un ours. D’habitude, je suis témoin de ce qu’il se passera mais là… je n’étais pas le témoin, j’étais Charlie…
- Qu’entends-tu par « tu étais Charlie » ? Demanda Eléazar, surpris par le ton grave de ma sœur.
- J’étais Charlie, au volant de sa voiture, je pensais ce qu’il pensait, je ressentais ses émotions, ses sentiments, je… je… j’étais Charlie, quoi !

Quelque chose me chiffonnait dans les explications de ma sœur. J’avais vu ce qu’elle voyait mais je ne comprenais pas ce sentiment de malaise qui m’assaillait à cet instant, jusqu’à ce que je mette la main dessus.

- Sue… avec le décalage horaire, il est quelle heure à Chicago ?
- Le décalage ? L’heure ? Mais pourquoi ?
- Quelle heure est-il approximativement à Chicago ?
- Je ne sais pas trop… 21 heures, peut-être 22… je sais seulement que c’est le soir, l’Agent Mallone m’a appelée une fois que l’équipe avait stoppé ses recherches à cause de la nuit qui tombait… pourquoi ?

Alice me regarda, stupéfaite par mon cheminement de pensées. Nous en arrivions à la même conclusion…

- Edward ! Alice ! Que se passe-t-il ? Qu’avez-vous ?
- Y’a un truc qui ne colle pas, Carlisle… Alice n’a pas vu le passé, elle a vu le présent…

Carlisle éclata d’un rire sans joie avant de nous regarder tour à tour, l’affliction gravée sur son visage, comme si nous étions des gamins de cinq ans auteurs d’une mauvaise blague.

- Voyons Edward, tu dis n’importe quoi ! L’Agent Mallone a bien dit que le Chef Swan avait eu un accident ce matin !
- Je sais bien Carlisle mais… Écoute, dans la vision d’Alice, la nuit tombait. Charlie était crevé et ne pensait qu’à rentrer à Forks afin de voir Bella et Sue…
- Et alors, ça ne veut rien dire ! Il est fort possible que la vision qu’Alice ait eue relatait les évènements d’hier soir mélangés à ceux de son accident !
- Dans ce cas, comment expliques-tu que Charlie savait « hier » que Bella rentrait de notre soit-disant voyage ? Cela ne s’est décidé qu’aujourd’hui !

Sue se figea, la bouche ouverte et le visage pâle.

- Je… je… Lorsque vous êtes rentrés de Seattle tout à l’heure et que j’ai su que Bella avait réussi le test d’être en présence d’humains sans problème j’ai… j’ai appelé Charlie pour lui dire que Bella et toi rentriez de votre voyage au Brésil… Je… je ne l’ai pas eu directement, je… j’ai laissé un message sur son répondeur… ça… ça ne fait que quelques heures qu’il le sait…

Ce fut au tour de mon père d’être frappé de stupeur et d’avoir la chique coupée. Sa bouche s’ouvrait et se refermait mais aucun son n’en sortait. Bella, quant à elle, se balançait entre mes bras, les yeux fermés, totalement étrangère à ce qu’il se passait, comme coupée du monde.

- Qu’est-ce que ça veut dire Car… Carlisle ? Co-comment a-t-il pu avoir son accident ce matin et Al-Alice une vision de Cha-charlie ce soir ?
- Je n’en ai aucune idée, Sue mais apparemment cet inspecteur se trompe… Je devrais peut-être essayer de le contacter et tirer ces informations au clair. Pourriez-vous me donner son numéro, Sue, que j’appelle cet agent ? Merci.

Carlisle retourna dans son bureau et pendant ce temps, Jasper tentait tant bien que mal de maintenir un calme artificiel dans la pièce. Sue Clearwater sanglotait sans retenue dans les bras d’Esmée et mon ange était totalement prostré au sol, le visage enfoui dans les genoux et les bras croisés au-dessus de la tête. Nous nous sentions tous impuissants face à ce qu’il se passait et les membres du clan Dénali étaient mal à l’aise, ils avaient l’impression d’être de trop.
Au bout d’une vingtaine de minutes, mon père revint, le visage neutre mais l’esprit embrouillé d’un milliard d’interrogations. Nous nous tournâmes tous vers lui, impatients de connaître les réponses que son interlocuteur lui avait données.

- Je viens d’avoir une drôle de conversation avec l’Agent Spécial Mallone… Comme vous devez le savoir, le FBI a alloué une voiture de fonction au Chef Swan, et c’est bien cette voiture qui a été repêchée dans le lac Michigan ce matin. J’ai également appris que Charlie ne devait pas travailler aujourd’hui, il voulait se reposer avant de prendre la route. Ils se sont donc rendus à son hôtel, espérant que la voiture avait été volée. Malheureusement, Charlie n’y était pas…
- C’est-c’est-c’est normal Carlisle… Cha-charlie a trouvé une petite ca-cabane de pêcheurs au bord du lac. Il-il y vit depuis quelques jours…
- Vous en êtes certaine, Sue ? Apparemment, le FBI n’en savait rien…
- Su-Sûre et certaine !
- Bref. Qu’il soit à l’hôtel ou dans cette cabane, personne ne l’a trouvé. Ils ont tenté de le contacter par téléphone depuis la découverte de la voiture et leurs appels sont restés sans réponse. Par contre… ils viennent juste de retrouver son téléphone portable, au bord du lac… Votre message le prévenant du retour d’Edward et Bella était toujours dans le répondeur et chose étrange, il était archivé. Charlie pourrait donc l’avoir reçu…

Bella releva la tête à ce moment-là puis se redressa violemment, manquant de me faire tomber au passage.

- Et ça signifie quoi tout ça ? Est-ce qu’il serait possible que mon père n’ait pas eu d’accident ce matin ? Alors pourquoi ces pseudos-recherches ? Et s’il vient seulement d’avoir son accident, il pourrait être inconscient ou blessé, quelque part sur les berges du lac ! Il est perdu, il faut le retrouver ! On doit y aller !
- Et comment veux-tu qu’on le retrouve, Bella ? Imagine qu’il se soit noy…
- Non ! Taisez-vous, je ne veux pas entendre ça ! On doit tout faire pour le retrouver !
- Tiens, tiens… On arrive au bon moment apparemment mon amour…

Nous nous retournâmes d’un mouvement vif au son de cette voix inconnue et découvrîmes avec stupeur deux vampires sur le pas de notre porte, un mâle et une femelle, que nous n’avions pas entendu ni senti arriver, trop pris par les évènements. Les pensées de Laurent s’affolèrent, il paniquait complètement. Apparemment, il les connaissait tous les deux et était loin d’être ravi à l’idée de les revoir. Mon père s’avança vers les nouveaux-venus qui nous observaient d’un air goguenard et dégoûté à la fois puis prit la parole.

- Bonsoir, je suis Carlisle Cullen. Vous vous trouvez actuellement chez moi et j’aimerai connaître vos noms et également la raison de votre intrusion dans une… réunion de famille.

Le mâle, plutôt grand et assez trapu, de longs cheveux blonds et sales attachés en catogan, prit la main de sa compagne, une grande femelle à la crinière d’un roux flamboyant puis s’approcha de Carlisle. Leurs yeux cramoisis ne laissaient aucun doute sur leur alimentation.

- Je m’appelle James et elle, c’est Victoria… Nous avons entendu parler de notre vielle connaissance Laurent il y a quelques jours, nous savions qu’il se trouverait ici…

Mon père se tourna vers le compagnon d’Irina, le regard envahi de questions silencieuses.

- Laurent, tu connais ces deux personnes ?
- Je… eu… Oui Carlisle… je…
- Ah ! Ah ! C’est d’être entré dans la secte des adorateurs de fourrures qui te met dans cet état Laurent ? Je ne te savais pas aussi gêné ! Se moqua le dénommé James.
- Je… euh… ça fait longtemps James… je ne m’attendais pas à te revoir, c’est tout…
- Pourrais-tu nous dire qui ils sont, Laurent ? S’impatienta mon père.
- James et Victoria… J’ai parcouru le monde avec eux pendant un peu plus d’un siècle avant de rencontrer Irina. Mais qu’est-ce que vous venez faire ici ?

La dite Victoria s’installa sur le sofa, observant les alentours, et jeta un regard écœuré aux loups tout en fronçant le nez, mais sans vraiment savoir pourquoi, tandis que James s’approcha de son « ami » et lui fit une accolade.

- J’ai eu quelques échos par l’un de nos amis communs… Benoît, tu t’en souviens ? Et… j’ai appris des choses intéressantes… Il semblerait que vous souhaiteriez vous attaquer au « Fléau ». Tu me connais Lau… je suis toujours à l’affût d’une bonne bagarre ! Pour résumer, nous sommes venus vous prêter main forte !

D’après les pensées de Jasper, un fort sentiment de sincérité habitait ces deux vampires. J’étais cependant ennuyé par le contenu de l’esprit de nos nouveaux-venus, leurs pensées étaient totalement décousues, leurs idées passant du coq à l’âne, ils ne se fixaient pas même une seconde sur une pensée et je me trouvais parfaitement incapable de savoir ce qu’ils pensaient.
Laurent, quant à lui, était mal à l’aise à l’idée que ses anciens compagnons de route soient avec nous. En plongeant dans son esprit, j’eus accès à certaines scènes d’une barbarie sans nom, principalement des chasses à l’humain, choses qui furent le quotidien de Laurent pendant de nombreuses années et qu’il souhaitait maintenant plus que tout oublier.

Je suis désolé Edward… J’ai tout fait pour ne pas les croiser lorsqu’on cherchait des contacts avec Irina. Je ne voulais pas qu’ils sachent, ils sont… sanguinaires… opportunistes… Je… Il ne faudra jamais les lâcher de vue… je n’ai pas confiance en eux…

- Aaaah ! Mais qu’est-ce que c’est que cette odeur ? Qu’est-ce qui pue comme ça ?

Je me tournais vivement vers Victoria qui s’était exclamée avec une grimace de dégoût, mettant ainsi fin à mon échange muet avec Laurent.
Les deux nouveaux-venus observaient les Quileute méthodiquement puis James fit un bond en arrière, étonné.

- Mais vous êtes quoi ? Vous avez un cœur qui bât, je l’entends, mais vous n’êtes pas humain ! Un humain n’empeste pas autant… Vous sentez le zoo… le fauve… non ! Vous puez le chien mouillé !

Jacob, habitué à nos échanges de mots doux, explosa de rire tandis que Sam grondait doucement, vexé par les paroles du vampire. Paul, lui, n’arrivait plus à se contenir, il y avait trop de vampires à son goût près de lui, surtout trop de « bouffeurs d’humains ». Il se mit à trembler violemment et Emmett eut juste le temps de le jeter sur son épaule avant de sortir comme une furie et de balancer l’indien à une centaine de mètres au sol qui explosa sous nos yeux, se muant en un gigantesque loup gris.

- DES ENFANTS DE LA LUNE ! Hurlèrent James et Victoria en se mettant instinctivement en position de défense.

Carlisle s’approcha d’eux et leur intima de se calmer avant de lancer un regard sévère aux Indiens.

- Ne vous inquiétez pas, ils ne vous feront pas de mal… Ce ne sont pas de véritables « enfants de la lune », ils…
- Et cette… chose dehors, vous en faîtes quoi ? Cracha le blond d’une voix venimeuse.

Jacob s’approcha à son tour, les bras croisés sur le torse, et planta son regard sombre et froid dans celui effrayé et calculateur du vampire.

- Nous sommes des modificateurs, sangsue, pas des choses… Nous nous métamorphosons en loup uniquement lorsque des vampires menacent les humains… Nous sommes des Protecteurs.

James se tourna vers mon père et siffla à voix basse.

- Vous allez les laisser nous tuer ? Vous vous alliez à ces… monstres ? Ce sont nos ennemis naturels !
- Il fut un temps où nous étions ennemis. Mais…certains évènements nous ont obligés à nous allier et depuis nous entretenons des relations cordiales voire amicales avec le peuple Quileute. Si vous acceptez le traité que nous avons conclu avec la Meute, vous n’aurez pas de problème avec eux…

C’est vite dit… sangsues… parasites… ça devrait pas vivre ces choses-là !

Je m’avançais à mon tour, relâchant ma Bella qui était toujours prostrée au sol, le corps tremblant parcourus de sanglots asséchés et silencieux.

- Jacob ! C’est bon… Nous avons conclu un pacte avec les Loups il y a soixante-dix ans. Nous n’attaquons aucun humain dans la région et nous n’allons pas sur leurs terres et en échange, ils nous laissent tranquilles et gardent le secret sur ce que nous sommes. En ce qui concerne ma famille, nous nous contentons de sang animal. Quand nous avons des invités au… régime traditionnel… ils se nourrissent en dehors de l’état ou se contentent du sang que mon père subtilise à la banque de sang de l’hôpital où il travaille.

Victoria ouvrit de grands yeux étonnés et se tourna vivement vers mon père.

- Vous travaillez dans un hôpital ! Mais comment ?
- Je suis médecin, oui. On va dire que depuis le temps que je parcoure cette terre, je me suis immunisé au sang humain. Je n’ai jamais eu à tuer un humain pour me nourrir et je préfère mettre mes… capacités, dirais-je, au service de la vie.

Alors que mon père continuait ses explications, Bella se releva brutalement, le regard noir de fureur et voilé par l’inquiétude.

- Les mondanités, c’est bien gentil mais il y a plus urgent ! Il faut retrouver Charlie ! Vite !
- Vous avez perdu l’un des vôtres ? Je peux vous aider à le retrouver, c’est dans mes cordes… Lança James d’un ton badin en contemplant les ongles de sa main droite.

Alors que ses pensées étaient très emmêlées, j’eus accès à certaines parties de chasse dont j’aurai préféré me passer…

- Tu es un traqueur ?

Il me répondit en hochant légèrement la tête, un petit sourire carnassier aux lèvres.

- Et c’est quoi ça, un traqueur ? Demanda ma douce d’une voix tendue.
- C’est… un peu comme un don… Son odorat et son ouïe sont plus développés que chez nous autres… Et il a une espèce de sixième sens… S’il capte une odeur qui lui plaît, il en deviendra obsédé et son instinct le poussera à traquer cette personne sans relâche jusqu’à la retrouver…
- Ce que ton… compagnon… essaye de t’expliquer, délicieuse créature, c’est qu’une fois que j’ai jeté mon dévolu sur une proie, elle ne peut pas m’échapper, même si elle se cache à des milliers de kilomètres… Je peux donc aisément retrouver celui que vous avez perdu, il me faut simplement capter son fumet… Expliqua James avec un sourire charmeur à l’intention de ma douce, qui me fit gronder.

J’entendis brièvement Sue dire à Sam qu’il y avait un pull appartenant à Charlie, dans sa voiture. Le Quileute sortit rapidement pour revenir quelques secondes plus tard, un tas de tissus informe entre les mains, puis il le tendit à James.
Le vampire inspira lentement le pull, s’imprégnant de la délicieuse odeur humaine, puis ouvrit de grands yeux choqués.

- C’est une plaisanterie ? Tout ce remue-ménage pour un casse-dalle ?

Il eut à peine le temps de finir sa phrase qu’il finit encastré dans le mur, la trachée comprimée par la poigne solide de ma Bella dont les yeux noirs comme une nuit sans lune brûlaient d’une intense colère.

- Le casse-dalle en question, c’est mon père… Alors maintenant, soit tu nous aides à le trouver, soit tu te casses…
- Lâche… moi…

Il est immonde ! Il pue la luxure à 100 mètres… ça l’excite de se faire dominer par Bella… Erk ! Ses sentiments sont écœurants…

Jasper me calma à l’aide de son don avant que je ne me jette sur cet intrus qui bavait d’excitation face à ma Bella. Mon ange, elle, relâcha James qui se massa la gorge, là où ma douce avait frappé. Un peu plus et sa misérable tête aurait sauté de son cou tel un bouchon de champagne.

- OK ! OK ! J’vais vous l’retrouver cet humain… Pfff… Non mais t’y crois, Vicky ? Tout ça pour un casse-dalle ! Tristesse et sombre décrépitude…
- La ferme, sangsue ! S’énerva Jake. L’humain en question, on y tient énormément. De toute façon, on n’a pas besoin de toi pour le retrouver, on peut très bien se débrouiller tous seuls !
- Ah ouais, et comment ? En reniflant le sol à la recherche d’une flaque de pisse comme les bons gros toutous que vous êtes ? C’est bon, j’vais vous aider. De toute façon, je n’ai plus le choix, maintenant… Son odeur m’enivre… Je dois le trouver…

Bella l’agrippa de nouveau à la gorge avant de susurrer à voix basse et venimeuse.

- Tu le trouves, d’accord… Mais ne t’avises pas d’y toucher où je te jure que je te ferai la peau…

James acquiesça et, n’ayant pas confiance en nous, surtout en les loups, il décida que sa compagne partirait également en chasse avec lui. Sam, quant à lui, imposa que Seth, Quil et Jared, les accompagnent. Il fut également convenu que Kate et Garrett se joindraient à eux, tout comme mon père au cas où Charlie nécessiterait des soins médicaux d’urgence.
Laurent me fit comprendre mentalement qu’il souhaitait me parler, à l’abri des oreilles indiscrètes. Alice eut un flash de notre discussion et après un bref signe de tête à Jasper, ils nous rejoignirent sur le perron.

Pas ici, il pourrait nous entendre… Rendez-vous dans 20 kilomètres au nord.

Nous fonçâmes tous les quatre dans la direction demandée par Laurent puis une fois suffisamment loin de la villa, nous nous arrêtâmes.

- Ben dis donc, tu pouvais pas trouver encore plus loin, Laurent ? Rigola Jasper.
- J’ai longtemps vécu avec eux, ce n’est pas pour rien que je vous ai emmené si loin… Lorsque James dit que son ouïe est très développée, il ne plaisante pas… Ici au moins, nous sommes suffisamment loin pour qu’il ne nous entende pas…
- Que t’arrive-t-il, Laurent, tu m’as l’air inquiet…
- Je te jure, Ed… je vous jure que j’ai fait tout ce qui était vampiriquement possible pour qu’ils n’apprennent pas ce que nous préparons à l’encontre de Félix… J’ai fait exprès de les éviter alors que je savais où les trouver…
- Tu ne leur fais pas confiance ? Pourquoi être resté si longtemps avec eux, alors ?
- Je n’en sais trop rien… à l’époque je me nourrissais d’humains et les chasses à l’homme de James m’amusaient follement… Mais… je les connais… ils sont instables, violents, ne pensent qu’à s’amuser… Les problèmes que vous rencontrez avec Félix, ils s’en foutent ! Pour eux, surtout pour James, c’est juste une occasion de s’amuser à ne pas rater… Je ne le sens pas tout ça… Ne leur faites pas confiance… Jamais !

Laurent nous observait gravement, droit dans les yeux, chacun notre tour. Alice, elle n’avait pas bougé, se contentant de fermer les yeux à la recherche d’un quelconque flash du futur.

- Personnellement, il n’y a qu’une chose qui me dérange, à leur sujet… Hormis bien sûr le fait qu’ils aient des ego surdimensionnés… Je… Je n’arrive pas à les voir… Comme s’ils étaient incapables de prendre une décision… J’ai beau me concentrer sur leur avenir, je ne vois rien…
- C’est vraiment étrange, Alice… Pour tout dire, j’ai un peu le même problème… Ils pensent à une quantité de choses à la fois mais ne s’arrêtent jamais sur une idée… Et toi, Jazz ? As-tu des soucis les concernant ?
- Hmmm… non. Je n’ai ressenti chez eux que volonté, envie, allégresse, décision, sincérité. Ils veulent réellement nous aider ! Euh… de la luxure aussi… et pas que chez James…

Tu lui plais à la rouquine, frangin !

Alice se mit à faire les cent pas en se massant les tempes, comme font les humains pour chasser un mal de tête.

- Dis-moi, Laurent, est-ce que James a un don ? Ou alors Victoria ? Demanda-t-elle.
- Non, James est seulement un traqueur… Victoria n’a pas de don, cependant… Il était mal à l’aise, ne sachant pas comment annoncer ce qui allait suivre.
- Cependant quoi ? S’impatienta Jasper.

Laurent fit un bond en arrière, surprit par le ton de mon frère, puis chercha ses mots avec soin.

- Victoria a… elle sait… Victoria sait toujours comment se sortir d’une situation compliquée… Je ne sais pas comment expliquer autrement…
- Qu’entends-tu par là ?
- Et bien… elle trouve toujours une porte de sortie, quelles que soient les situations… à l’époque où je traînais avec eux, James avait flairé les parfums d’une jeune humaine et sa famille qui lui plaisaient particulièrement. Le souci, c’est qu’il y avait déjà une dizaine de vampires sur l’affaire… Des armoires à glace, imagines-toi une dizaine de types taillés comme Emmett… Et nous, on était que trois… James ne s’est pas démonté pour autant, il les voulait, les humains l’obsédaient… Avec l’aide de Victoria, on leur a fauché leurs proies, sous leurs nez ! Elle a su constamment nous dire comment agir et où partir, comment dévier leurs attaques, nous avons pu les semer et… nous régaler ensuite…
- Hein, hein… elle est douée pour l’esquive si j’ai bien compris…
- Ouais Jasper, c’est un peu ça… Pas spécialement incroyable, comme vos dons à vous, mais sacrément pratique, croyez-moi !

Alice, qui l’avait écouté avec application, recommença à tourner en rond.

- Je ne comprends pas… Même si son don c’est l’esquive, je ne vois pas comment ils peuvent brouiller mes visions ou encore la télépathie d’Edward ! Ça m’énerve ! Ça m’éneeeeerve ! Mais j’y pense, James nous a parlé d’un certain « Benoît » ! Lui aurais-tu parlé de nos dons, Laurent ?
- Quoi ? Mais non ! Jamais de la vie ! Je n’ai jamais parlé à qui que ce soit de vos talents, je vous le jure !
- Il dit la vérité, Alice. Expliqua Jasper tout en jetant une vague de calme sur notre mini-assemblée. Pourquoi pensais-tu que Laurent avait parlé, mon amour ?

Ma sœur se mit à triturer ses doigts, mal à l’aise, puis elle regarda le bout de ses chaussures avant de répondre d’une toute petite voix :

- Et bien… J’avais comme l’impression que James et Victoria étaient au courant pour nos dons… Je ne vois rien… Eddy n’entend rien… c’est comme s’ils savaient comment contourner nos défenses ! C’est bête, hein ? Désolée de t’avoir accusé sans raison, Laurent…
- Ne t’inquiète pas Alice, je comprends… Je n’aimerai pas être à ta place et avoir l’impression qu’on joue avec mon talent, si j’en avais un… On ferait bien d’y retourner, qu’ils ne nous soupçonnent pas trop… Ne leur faites pas confiance, c’est tout ce que je peux vous dire… Et surtout, je ne vous ai rien dit, hein ?

Nous hochâmes la tête brièvement avant de reprendre le chemin de la villa où nous retrouvâmes les autres en grande conversation sur le nouveau jeu du jour : « Trouver Charlie ».
Emmett ceinturait Bella dans un coin alors que celle-ci avait les yeux rivés sur James et grondait doucement. Le vampire aux yeux bordeaux lui souriait d’un air goguenard alors que des pensées lubriques à l’encontre de ma douce lui traversaient l’esprit. Je me mis à grogner lorsque je l’entendis et il haussa les épaules en s’excusant lorsqu’il s’aperçut que j’étais revenu et que je l’avais surpris en train de mater sans vergogne ma compagne.

J’y peux rien, mec ! Elle a un sacré beau p’tit cul ta nana ! Et la colère… humm… ça la rend cent fois plus bandante qu’elle ne l’est ! J’en ferai aisément mon quatre heures de ce beau p’tit lot…

Je lui jetais un regard perçant, ne comprenant pas le sens de ses pensées. Savait-il que je pouvais l’entendre et s’en excusait-il ? Ou au contraire, n’en savait rien et s’excusait pour lui-même d’avoir de telles pensées à l’encontre de ma belle ?
Alors que nous mettions au point un plan pour retrouver Charlie, James et Victoria profitèrent de l’hospitalité de mes parents pour prendre une douche, chose totalement incompatible avec leur mode de vie habituel. Alice leur donna des vêtements propres et confortables ainsi que des chaussures de randonnée, et une fois lavés et habillés, les deux nomades avaient une toute autre allure.
Au bout d’une heure de palabres sur qui allait faire quoi et comment, James et Victoria reprirent la route en direction de Chicago, à la recherche de Charlie Swan. Côté loup, afin de les aider dans la traque, Seth, Quil et Jared les accompagnaient, et côté vampire, mon père, Kate, Garrett, Laurent, car James et Victoria voulaient échanger quelques souvenirs du « bon vieux temps ». Irina ainsi que Jasper complétaient la troupe, mon frère devait s’assurer que les deux nouveaux-venus ne nous feraient pas d’entourloupes, mais également sonder la véracité des propos de l’Agent Mallone puisque les conditions de la disparition du Chef Swan n’étaient pas très claires. Sue leur donna également l’adresse de la petite cabane de pêcheur où Charlie logeait, des fois qu’il s’y trouverait…
Le groupe se mit enfin en route, Carlisle, Irina et Kate en voiture, et les autres à pied ; ils seraient plus vite arrivés. Mais allez expliquer à un humain, surtout un agent du FBI, qu’une personne est plus rapide à la course qu’au volant d’une voiture ! Il nous prendrait pour des fous…
Nous les observions partir, la peur et l’inquiétude au ventre, ne sachant pas dans quel état ils trouveraient le Chef Swan…
S’ils le retrouvaient.

*******************************************

- Allez Bella ! S’il te plaît !
- Non Alice, je n’ai pas envie…
- Mais si, on va s’amuser ! Une petite chasse entre filles et ensuite quelques heures de shopping pour te…
- J’ai dit NON ! Laisse-moi s’il te plaît…
- Mais Be…

Ma sœur n’eut pas le temps de finir sa phrase que Bella était déjà loin, partie sans se retourner en direction de son refuge.
Cela faisait deux semaines que le Chef Swan avait disparu sans laisser de traces. Deux semaines que le groupe le recherchait inlassablement, nuit et jour, fouillant chaque buisson, chaque fourré, chaque terrier, chaque grotte, à la recherche d’une piste quelconque. Kate et Garrett allaient même jusqu’à sonder les fonds du lac Michigan, chaque nuit, à la recherche d’un corps éventuel.
Cela faisait deux semaines que Sue Clearwater pleurait toutes les larmes de son corps, se désespérant à la Push, entourée de sa fille, d’Emily et d’Angela qui se relayaient pour l’inciter à manger.
Cela faisait deux semaines que Bella ne parlait plus, ne se nourrissait plus, refusait la compagnie des uns et des autres, refusait tout contact, même le mien. Elle passait ses journées et ses nuits à méditer sur le gros rocher blanc près de la cascade dans la clairière, ne rentrant que pour prendre des nouvelles sur l’avancée des recherches sur son père.
Depuis que les nôtres étaient partis pour tenter de retrouver le Chef Swan, Bella s’était murée dans le silence et la solitude, fuyant constamment les conversations ou les personnes. Elle avait les nerfs à fleur de peau, bouffée par l’angoisse, mais elle se refusait à partager sa souffrance. Elle n’avait pas chassé depuis ce soir-là et commençait à être sérieusement rongée par la soif, ce qui n’arrangeait rien et ne faisait que compliquer les choses. J’avais tenté à plusieurs reprises de l’emmener chasser de force, j’avais même poussé le vice jusqu’à lui apporter ses proies et lui servir dans un verre, mais Bella était une vraie tête de mule et refusait obstinément de boire.
Je souffrais épouvantablement de la voir dans cet état, mais elle ne le voyait pas, obnubilée par la disparition de son père. Je la comprenais, bien sûr ; Charlie était le seul parent qui lui restait et elle l’aimait plus que tout. Je ne supportais plus de la voir se laisser-aller ainsi et j’étais certain que le Chef Swan refuserait qu’elle se laisse dépérir s’il lui arrivait quelque chose. Je lui avais dit, à maintes reprises. Et à chaque fois, ça avait dégénéré…
Allez donc essayer d’enfoncer quelque chose dans sa caboche épaisse et on en reparlera !
Ne supportant plus de tourner en rond dans le salon - enfin, je venais plutôt de me faire virer par Esmée car j’avais ruiné le parquet à force d’y faire les cents pas – je filai jusqu’au cottage afin d’évacuer toute ma frustration sur mon fidèle piano.
Alors que j’enchaînais les accords, laissant les notes s’égrener au gré de mes sentiments, mon regard tomba sur la bibliothèque, plus précisément sur une petite boîte à moitié cachée par les livres. Il fallait vraiment chercher pour la voir, mais je savais qu’elle était là.
Je savais également ce qu’elle contenait.
Mes yeux se vrillèrent sur l’écrin de velours bleu-nuit renfermant la bague de fiançailles que j’avais achetée pour Bella.
Les évènements s’étaient enchaînés si vite depuis le jour où je l’avais acquise… Je n’avais jamais trouvé le moment adéquat, ni pu faire ma demande.
Je voulais montrer à ma Bella que j’étais capable de romantisme avant de mettre le genou au sol et de poser la question qui scellerait notre éternité, je voulais faire de ce jour, ou cette nuit, un instant mémorable, mais pour cela, il me fallait encore attendre…
Je trouvais plutôt de mauvais goût le fait de demander sa main à Bella alors que nous étions toujours sans nouvelles de Charlie et que les chances pour qu’il soit encore en vie étaient de plus en plus maigres chaque jour.
Je m’acharnais sur les touches d’ivoire, évacuant frustration et tension accumulées ces derniers temps au gré des notes, le regard constamment attiré par l’écrin de velours du saphir. Ce misérable caillou, ridicule témoin des sentiments démesurés que je nourrissais pour ma douce, m’obsédait littéralement. J’étais incapable de réfléchir de façon cohérente, l’esprit envahi de mille et un fantasmes sur ma prochaine demande en mariage, mais l’instant était vraiment mal choisi. Tant que nous ne saurions rien au sujet de Charlie, je devrai garder le silence.
Mes doigts martelaient constamment le clavier lorsqu’une odeur sulfurée me parvint aux narines ; l’orage arrivait à grands pas et à peine cinq minutes plus tard, un éclair zébra le ciel, confirmant mes suppositions.
J’arrachai mon regard de l’écrin et le tournais vers la forêt, sachant pertinemment que malgré les trombes d’eau et les éclairs, Bella ne quitterait pas la clairière.
Je soufflais bruyamment et refermais sèchement le couvercle du piano, et ignorais volontairement la mélodie « chapi-chapo » provenant de mon téléphone alors que je me décidais à rejoindre mon ange. Ce n’était pas le moment de faire attention à Alice.
Je finis par rejoindre mon amour au pas de course mais ralentis lorsque la clairière fut en vue, m’offrant une vision de désolation qui me fendit le cœur.
Une déforestation massive avait eue lieu, agrandissant considérablement la trouée qu’il y avait auparavant. Quelques souches subsistaient parfois, semi-enterrées, mais dans la plupart des cas, les arbres étaient pulvérisés, les branches éclatées ça et là.
L’endroit qui, d’ordinaire, était couvert d’un agréable tapis de fleurs dès l’arrivée des beaux jours sera totalement nu et stérile au printemps, donnant l’impression d’avoir été labouré à l’aide d’une pelleteuse et passé au bulldozer.
L’atmosphère douce et chaleureuse avait laissé place à la désolation et à la tristesse. Un endroit désormais funèbre où régnait un chaos extrême…
Le seul élément intact de l’ancienne clairière était le gros rocher blanc, situé près de la cascade.
Comme je m’y attendais, une fois la surprise passée, je trouvais Bella, assise en tailleur sur le roc, parfaitement immobile, merveilleuse incarnation de la Beauté statufiée. Perdue dans ses pensées, le corps ruisselant de pluie, les yeux grands ouverts et rivés sur un point lointain, elle ne semblait pas s’être aperçue de ma présence.

- Bella ?

Seuls le silence et l’orage me répondirent.
Je m’approchais d’elle lentement, lui laissant le temps de capter mon odeur et ma présence, puis une fois à son niveau, mon visage face au sien, je me rendis compte qu’elle ne me voyait même pas ; elle avait le regard ailleurs, perdu dans un monde de chimères.
Je pris délicatement son beau visage si triste entre mes mains et effleurais doucement ses lèvres des miennes avant de me reculer le cœur gros en voyant qu’elle n’avait aucune réaction.
Un éclair aveuglant zébra le ciel avant que la foudre ne s’abatte près de nous, fendant un gros chêne liège au passage.

- Bella…
- …
- Bella viens ! S’il te plaît…
- …
- Il pleut mon ange… Ne reste pas là…
- …
- L’orage ne se calmera pas avant longtemps…
- …
- Je t’en prie Bella ! Rentre avec moi… S’il te plaît…

Je continuais mon monologue ainsi, sur le même registre, pendant une vingtaine de minutes avant d’abandonner finalement face à ce mur de silence.
Son regard ne s’était pas éclairé une seule fois, ni même focalisé sur moi, comme si je n’étais absolument pas là.
Je lui parlais, elle ne m’entendait pas.
Je la regardais, elle ne me voyait pas.
Je la touchais, elle ne me sentait pas.
J’avais le sentiment de ne pas exister à ses yeux…
J’insistais encore une heure, m’obstinant à lui parler, sans pour autant obtenir de réponse. Tout compte fait, j’aurai certainement plus de chance en m’adressant à un mur…
Deux semaines que je subissais la loi du silence selon Bella, et ça commençait à me peser sérieusement…
Deux semaines qu’elle passait son temps sur ce putain de caillou…
Deux semaines que je m’acharnais sur mon piano en matant un tout autre caillou…
Deux semaines.
Et ce n’était que le début…
Je donnais un coup rageur sur un rocher près de Bella et mon poing, messager de toute ma frustration, passa au travers dans un fracas étourdissant.

- J’dois faire quoi putain ? J’dois faire quoi pour mériter ne serait-ce qu’un regard ?

Bella ne bougea même pas un cil, totalement amorphe, apathique.
Je pouvais hurler, briser voire même me rouler par terre, elle ne s’en préoccupait même pas. J’avais l’impression de n’être qu’une petite chose futile, indigne de considération. Un insecte. Une épingle dans le cul.
Je serrai les poings et soufflais difficilement, faisant autant de bruit qu’un emphysémateux, et pris à nouveau le chemin de la villa.

- Merde Bella ! Tu fais chier…

J’avais à peine chuchoté ces quelques mots que j’eus l’impression d’entendre un sanglot. En prêtant attentivement l’oreille, je m’aperçus que la pluie avait redoublé d’ardeur. J’avais dû, une fois de plus, rêver…

*****************************************


Les jours défilaient lentement, interminables, monotones.
Nos quotidiens devenus si routiniers continuaient de se suivre, immuables, constants.
Rosalie, affalée sur le sofa, les pieds posés sur la table basse, se limait les ongles en chantonnant distraitement, totalement indifférente à ce qui l’entourait.
Alice dessinait quelques modèles qui seraient, selon elle, à la pointe de la mode dans deux ans.
Emmett et Seth, qui était passé nous donner des nouvelles de sa mère, disputaient une partie acharnée de « Medal of Honnor ».
Esmée, de son côté, rénovait un vieux secrétaire qu’elle avait déniché sur une brocante, avec le soin et la méticulosité qui la caractérisent.
Quant à moi, je tournais en rond, une fois de plus, les pensées focalisées sur ma Bella qui avait élu domicile sur son putain de rocher.
Cela faisait dix jours que j’avais quitté la clairière avec perte et fracas, saccageant tout ce qui se trouvait sur mon passage. Bella, elle, n’avait pas bougé d’un iota, elle avait fusionné avec sa saleté de caillou.
J’allais la voir tous les jours, mais ça ne servait strictement à rien. Alors je l’observais de loin, assis sur la branche d’un immense épicéa, m’assurant qu’elle allait bien, au moins physiquement…
Vingt-quatre jours.
Cela faisait exactement vingt-quatre jours que nous étions sans nouvelles de Charlie.
Vingt-quatre jours que Bella ne chassait plus et le manque de sang s’en faisait largement ressentir…
La porte d’entrée s’ouvrit brutalement sur un Jacob énervé et une Tanya consternée.

- Elle m’emmerde !
- Mais voyons mon loulou, ce n’est pas de sa faute !
- Ouais ben si elle se décidait à bouger son cul, ça irait mieux ! Tu crois vraiment que c’est ce que Charlie voudrait ? Que sa fille unique laisse crever de faim ? Qu’elle se prenne pour un caillou ? Elle fait chier, c’est tout !

Il se laissa lourdement tomber sur une chaise, près de Seth et Emmett, tandis que Tanya lui massait la nuque.
Après avoir croisé Jake à mon retour de la clairière dix jours auparavant, et après qu’il ait vu l’état déplorable dans lequel j’étais, il s’était fait un point d’honneur à aller chaque jour secouer Bella pour la forcer à redescendre de son piédestal. Peine perdue, évidemment…

- Eddy ! Arrête de tourner en rond ! Tu creuses le parquet, là…
- Tanya ?
- Ouiii ?
- La ferme.
- Oh ! Moi c’que j’en dis… Je rigolerais bien quand Esmée verra l’état de son parquet et je serai au premier rang pour te voir administrer une belle fessée ! Pfff…

Bon, en y regardant de plus près, il est vrai que le parquet commençait à s’user sous mes pas incessants. Mais de là, à me prendre une déculottée, il y a une sacrée marge !
Je tournais comme un lion en cage à longueur de journée, à l’affût du moindre signe. Au moins, pendant que je faisais les cents pas, je ne pensais plus trop au comportement désastreux de Bella à mon égard.
J’avais le cœur brisé et la raison dévastée, je n’arrivais plus à penser rationnellement.
Après tout ce qui lui était arrivé, j’avais peur que Bella n’ait atteint son point de rupture et qu’elle ne commette le pire. J’étais terrorisé à l’idée qu’elle nous quitte pour choisir une vie de nomade, sans attaches, ou encore qu’elle commette un acte impardonnable pour nous, vampires et qu’elle n’en subisse le prix…
Je me perdais dans un monde de pensées toutes plus sombres les unes que les autres et brutalement, un petit bruit feutré me ramena à la réalité.
Alice venait de faire tomber son crayon, le corps figé, les yeux perdus dans les méandres du futur, avant de revenir à elle quelques secondes plus tard.

- Edward, tu peux décrocher s’il te plait ? James va appeler ! Pfff… Jacob Black, tu es pénible, une vraie ruine en fringues…

Au même instant, Jacob se ruait vers la clairière sous sa forme lupine, ses vêtements déchirés s’éparpillant au gré du vent.

Si la sangsue dégénérée appelle, Bella doit savoir ce qu’elle raconte !

Alice souffla théâtralement avant de filer dans sa chambre et de redescendre tout aussi vite, un paquet de vêtements sous le bras qu’elle déposa sur le perron à l’attention du Quileute.
La Meute passait tellement de temps chez nous que ma sœur leur avait crée un dressing, spécialement pour eux. Inutile de vous dire qu’elle s’était fait un plaisir de le remplir en traînant ces pauvres Indiens dans d’interminables heures de shopping.
La porte de la villa s’ouvrit, Jacob entra tout en boutonnant son jeans. Il avait réussi à traîner Bella avec lui et Alice poussa un hurlement à vous glacer le sang lorsqu’elle vit l’état dans lequel était mon ange.
Les cheveux emmêlés par le vent et collés par la terre et les feuilles mortes, les vêtements troués par endroits et maculés de boue, le visage totalement inexpressif et les yeux noirs, brûlant d’une soif intarissable, Bella était une âme errante, vision fantomatique qui n’avait plus rien à voir avec celle qu’elle était.
Je posais vivement ma main sur la bouche de ma sœur avant qu’elle ne hurle à nouveau et lui jetais un coup d’œil, lui intimant silencieusement de se taire. Elle ne ferait qu’envenimer les choses…
Je m’aperçus subitement que Bella remettait son épaule en place…
Lorsqu’il vit mon regard et sentit ma main comprimer sa gorge, Jacob s’adressa silencieusement à moi.

Je suis désolé mon pote ! Je voulais seulement la faire réagir. Je l’ai percutée de plein fouet en pensant me confronter à son bouclier mais je l’ai quand même touchée, trop fort. Elle n’a plus aucune barrière physique… Elle se laisse mourir de soif… Elle a perdu sa force… Je ne pensais vraiment pas lui faire de mal ! Si tu savais à quel point je m’en veux…


Je le laissais tomber brutalement au sol et son ego en prit un coup lorsqu’il se retrouva le cul encastré dans le parquet.
Je cherchais Bella du regard et la trouvais près de l’entrée, les yeux fermés, la tête basse, se dandinant d’un pied sur l’autre, adoptant un comportement semi-autistique et qui me brisait encore plus en la voyant ainsi…
Le téléphone sonna, me coupant de ma contemplation morbide ; je pris le combiné.

- Résidence Cullen.
- Eddy ! Mon pote ! Comment ça va à Forks city ?
- Ca pourrait aller mieux, James. Et arrête de m’appeler « Eddy ». Premièrement, j’ai horreur de ça, deuxièmement, on n’a pas élevé les cochons ensemble.
- Rhooo… Toi, tu devrais arrêter de bouffer Bambi, Fleur et Pan-Pan et surtout, tu devrais tirer un coup, ça te rendrait plus joyeux !
- Je n’ai pas besoin de tes conseils, James ! On peut savoir pourquoi tu appelles ?
- Pour entendre ta charmante voix posée ! Quoique j’aurai nettement préféré entendre celle de ta si délicieuse compagne…
- Tu t’égares…
- Ahlala ! On ne peut même plus plaisanter. Quelle tristesse !
- James !
- Oui ! Oui ! C’est bon ! J’y viens ! Attends… Comme vous le savez, ça fait plus de trois semaines qu’on drague les fonds du lac, qu’on sniffe chaque brin d’herbe, surtout les chiots, mais que nous n’avons aucune trace du casse-dalle…
- Grrr…
- Euh pardon… du papa chéri Swan. On a trouvé une piste. Maigre… très maigre… Mais une piste quand même. Il a bien fait un petit séjour dans l’eau, mais j’ai perçu une faible effluve de son odeur, sur les berges. Je ne l’ai pas reconnue de suite car elle était vraiment ténue, mais surtout altérée par six autres fragrances humaines, bien plus fortes.
- Que veux-tu dire par là ?
- Un séjour dans l’eau, qu’il soit court ou prolongé, altère énormément les odeurs, mon cher Eddy. C’est pourquoi je ne l’ai pas perçue plus tôt.
- En clair, ça donne quoi ?
- Ça donne que le casse-dal… euh Chef Swan… a été repêché de l’eau par un groupe d’humains. Au vu de l’odeur, si faible soit-elle, ça remonte à avant notre arrivée sur les lieux. Et puis… on l’aurait vu s’il n’avait pas été trouvé avant… Nous avons suivi la trace jusqu’à l’hôpital. A partir de là, les six autres odeurs sont parties dans des directions différentes, trois pour être précis.
- Donc Charlie est à l’hôpital ?
- Attends ! J’ai pas dit ça… Carlisle s’est renseigné, il n’y a eu aucune admission pour une noyade sur la période qui nous intéresse et il n’y a aucune trace du Chef à l’hosto. Le doc est aussi allé à la morgue mais il n’a rien trouvé non plus. Joe le balafré et Garrett sont partis avec ma Vicky pour… visiter… la chambre froide de la faculté de médecine, des fois que le casse-dalle serve pour les expérimentations.
- GRRRRRR….
- Oh ! Tout doux mon mignon ! Ah bah attends, les r’v’là. Oui… Hein hein… aaaah… sûrs et certains? Ok, j’y dis ! Bon, me r’v’là ! Il n’y a aucune trace de Charlie à la fac.
- Ok. Et le résultat de tout ça, ça donne quoi ?
- Ben… que le papounet chéri de ta délicieuse amie a été repêché du lac, vivant car son odeur, bien que très faible, était toujours une odeur vivante, mais on a perdu sa trace à l’hôpital. Avec ma Vicky, Laulau et Irina, on va suivre les pistes des six bons samaritains, sait-on jamais. Perso, j’y crois pas des masses, le fumet du Chef n’accompagnait aucun des leurs…
- Est-ce que… est-ce qu’il y a encore des chances pour que Charlie soit encore en vie ?
- Franchement ? Aujourd’hui, j’sais pas trop, mais il y a trois semaines, il était aussi vivant que n’importe quel casse-dalle, même si son état n’était pas tip-top. Tu peux donc rassurer ton joli p’tit lot et lui dire que son papounet chéri doit se retaper quelque part ! Bon, c’est pas que j’m’ennuie avec toi Eddy, mais j’aimerai bien me caler un truc sous la dent avant d’aller à la chasse au bon samaritain ! Bye !

Un ‘clic’ suivit de plusieurs tonalités me remit les pieds sur terre. Je reposai le combiné téléphonique et vrillais mon regard à celui de Bella.
Une minuscule étincelle animait faiblement le regard mort de ma belle. Ce n’était pas grand chose, mais je ne rêvais pas, elle était bien là.
Comme tous ceux présents dans la pièce, Bella avait entendu ma conversation avec James et elle savait donc qu’il y avait de fortes chances que l’on retrouve le Chef Swan en vie, bien qu’il se soit évaporé dans la nature.
Un faible ‘merci mon Dieu’ s’échappa de ses lèvres et elle agrippa doucement ma main, la pressant légèrement. Je savourais ce petit geste, premier contact que mon ange initiait depuis tout ce temps et ronronnais presque lorsque ses lèvres se posèrent timidement sur ma joue.

- Je… j’ai un truc à faire… je… je t’appelle quand j’ai fini… d’accord ?

J’eus à peine le temps de réagir qu’elle était à nouveau partie en coup de vent.
Je caressais ma joue à l’endroit où ses lèvres s’étaient si brièvement posées et souriais béatement sachant que ma Bella m’avait embrassé.
Alice hoqueta subitement de stupeur et elle me bloqua instantanément ses pensées, se concentrant sur le prochain défilé de Karl Lagerfeld afin que je n’accède pas à ses visions.
Elle avait le regard pétillant d’allégresse et sa joie était communicative puisque même ma reine des glaces de sœur se mit à sourire. Tanya, elle, se mit à frapper dans ses mains et Esmée était débordante de joie et d’amour. Jacob, Seth et Emmett haussèrent les épaules en voyant la réaction des filles avant de retourner à leur jeu vidéo.
Ne comprenant absolument rien à ce débordement, qui ne touchait que les membres féminins de notre famille, je mis ça sur le compte d’un trop plein d’œstrogènes et pris la quatrième manette pour jouer avec nos amis.
Une heure d’attente angoissante et deux manettes explosées plus tard, mon portable sonna, indiquant l’arrivée d’un message.

« Passe par la chambre et rejoins-moi sur la terrasse dans 20 minutes. Love. B. »

OUIIII ! SUPER ! GENIAL ! Oh je vois… Rhaaaa ! Sors de ma tête crétin ! Une poule sur un mur, qui picotait du pain dur… picoti… picota…

Alice était complètement surexcitée. Elle avait sûrement déjà vu ce que Bella me réservait et ne voulait pas me gâcher la surprise.
Intrigué par leurs comportements, je fis ce que mon ange me demandait dans son message et me rendis au cottage.
Si mon cœur n’était pas déjà mort, il aurait battu à vive allure, à cause de l’appréhension, de l’attente, de la surprise, de l’excitation.
Une fois dans la chambre, je fus surpris, et ma foi un peu déçu, de la trouver vide.
Mon regard tomba sur le lit, ou plutôt sur une longue boîte noire, satinée, entourée d’un épais ruban rouge. Une enveloppe traînait négligemment sur le couvercle, je m’en saisis et la décachetais avant d’en sortir un morceau de papier bristol contenant uniquement deux mots :

Mets-moi.

J’ouvris la boîte et après avoir ôté le papier de soie à l’intérieur, je découvris une chemise noire, un pantalon à la coupe impeccable et une veste, noire également.
Intrigué, je me rendis à la salle de bains avec ces vêtements et pris tranquillement ma douche.
Je me demandais ce que pouvait manigancer ma Bella. Elle avait passé tout son temps en solitaire, allant jusqu’à m’ignorer à cause de l’angoisse qu’elle ressentait. Apparemment, les dernières nouvelles que nous avions reçues à propos de Charlie, bien qu’étranges et plutôt évasives, avaient opérées un certain changement chez ma douce.
Bah, je n’allais certainement pas m’en plaindre !
Une fois douché et séché, je me préparais et enfilais ce que Bella m’avait préparé.
J’arrivais pile-poil sur la terrasse à l’heure dite. Mon regard balaya l’endroit avant de tomber sur une paire de talons vertigineux de couleur or. Mes yeux suivirent lentement le galbe des splendides jambes fuselées qui étaient suspendues aux escarpins et arrivés à mi-cuisse, ils tombèrent sur un foisonnement de soie et de mousseline rouge sang, puis sur un ventre plat et ferme, à peine recouvert de tissu, avant d’arriver à une poitrine haute et voluptueuse moulée dans la soie, puis remontèrent sur un buste altier, et lorsque mon regard tomba sur le visage de la divine créature qui me faisait face, j’eus l’impression d’être comme le loup de Tex-Avery face à la Pin-Up.
Mes yeux roulèrent dans leurs orbites avant de s’en extirper comme des obus, ma langue dégringola jusque par terre, délivrant des torrents de bave, une loupiote clignotait WARNING dans ma tête, la vapeur s’échappa de mes oreilles et je décollais d’un bond en hurlant.
Bella était tout simplement divine.
Ses cheveux savamment gonflés et légèrement attachés en un chignon flou, libérant quelques mèches qui gravitaient autour de son visage, ses yeux légèrement teintés de noir, approfondissant son regard, ses lèvres peintes d’un rouge aussi riche et profond que celui de sa robe. J’avais l’impression d’être face à une déesse démoniaque, capable de subjuguer n’importe qui au moindre regard.
Après m’être abreuvé tout mon saoul de cette exquise vision, je retrouvais, enfin, l’usage approximatif de la parole.

- Bella… je… tu… tu es magnifique.

Elle baissa les yeux et je voyais presque un rougissement fleurir sur ses joues.

- Tu… tu n’es pas mal non plus, Edward. Chuchota-t-elle timidement, sans pour autant oser lever les yeux.

Le silence retomba entre nous, ni l’un, ni l’autre n’osant parler après ces si longs jours de mutisme et d’éloignement.
J’étais gêné de me retrouver face à elle, je me sentais si petit face à tant de splendeur presque irréelle. Je me pinçais discrètement pour vérifier que je ne rêvais pas, puis avançais timidement d’un pas vers elle. Bella souffla longuement puis fit le reste du chemin qui nous séparait.
Cela me faisait drôle de la voir évoluer, perchée sur des talons aiguilles aussi vertigineux, sans s’emmêler dans ses propres pieds !
Elle s’avança lentement et gracieusement vers moi ; j’attrapais doucement sa main avant de la coller contre moi et de lever son beau visage. Ses yeux étaient d’un noir d’encre, mais irrésistiblement envoûtants, et je caressais lentement les cernes sombres qui les soulignaient ; mon ange était terriblement assoiffé… Je m’en voulais de ne pas l’avoir fait fléchir pour se nourrir.

- Ne culpabilise pas, mon amour… je vais bien…
- Bella ! Ne me mens pas, je sais que…
- Et moi, je te promets que tout va bien. Ne gâchons pas cette soirée à cause de ça, s’il te plait !

Exaspéré par son côté buté, je me tendis légèrement avant de souffler et de relativiser les choses. Elle aura tout le temps de chasser ensuite, non ?
Bella m’entraîna à sa suite et récupéra un petit sac et un châle assorti à ses escarpins, puis attrapa son téléphone portable qui annonçait l’arrivée d’un texto. Elle le lut rapidement puis le glissa dans sa pochette, un petit sourire énigmatique aux lèvres. Bella reprit ma main puis m’emmena dehors où je fus ébahi de trouver ma Vanquish. Comment est-elle arrivée là, celle-la ?


- Oh ! Oh ! Oh ! Tu me fais quoi, là ?
- Et bien c’est évident, Edward. Je conduis !
- Ah non ! Non ! Non ! C’est mon bébé à moi, ça ! Personne ne la conduit à part moi !
- Pour une fois, si ! Assieds-toi et laisse-moi te conduire !
- Mais… c’est… mon trésor ! Tout mais pas ça, Bella !
- Edwaaaard ! Je n’ai pas tenu un volant depuis ma transformation…

Sa voix était déchirante de tristesse et son regard si poignant que je ne pus me résoudre à lui interdire de conduire.

- Pfff… Ok… mais tu y fais attention à mon bébé, hein ?
- Non ! Je vais me prendre tous les panneaux de signalisation et tous les murs qui seront sur mon chemin ! Bien sûr que je vais y faire attention à ton… bébé ! Cracha-t-elle en regardant ma précieuse voiture d’un œil noir.

Humm… Jalouse ?

Mon ego en prit un coup lorsque je m’assis à la place du mort, mais il se musela de lui-même en voyant à quel point Bella rayonnait au volant. J’espérais que, comme pour les talons hauts, sa conduite se sera améliorée avec la transformation !

- Nous allons où, mon ange ?
- Surprise !

Je me renfonçais dans mon siège, renfrogné par sa réponse puis me mis à tripoter le lecteur CD. Les « Nocturnes » de Chopin emplirent l’habitacle tandis que nous foncions je ne sais où. Les capacités automobiles de ma Bella s’étaient considérablement accrues avec la transformation et elle maniait le volant et l’embrayage comme une pro de la course automobile, le sourire aux lèvres. Elle ne ralentit que trois fois, lorsque je la prévins de contrôles routiers. Subitement, je vis le panneau « Seattle, dix kilomètres ».

- Seattle ? Tu plaisantes, Bella !
- Non pourquoi ?
- Je… écoute bébé… ce n’est pas une bonne idée… tu es trop assoiffée…
- Fais-moi confiance Edward ! Je t’assure que tout ira bien !
- Mais je…
- Fais-moi confiance, c’est tout.

Elle s’enferma dans un silence buté jusqu’à notre arrivée en ville.
Personnellement, je ne le sentais pas… mais alors pas du tout ! Autant faire entrer un renard affamé dans un poulailler !
Nouveau-né assoiffé + humains à proximité = carnage assuré !
Mon portable sonna et le message d’Alice apparut.

« Fais-lui confiance et excuses-toi
si tu veux passer la soirée telle qu’elle était initialement prévue ! »

Mouais… connaissant la frangine, elle avait dû envisager tous les scenarii possibles.
Je soufflais lourdement et tentais de lui parler à plusieurs reprises, ouvrant la bouche et la refermant ensuite, me donnant des airs de poisson rouge apoplectique, puis voyant que Bella était toujours concentrée que la route, les lèvres pincées et la mâchoire serrée, je me décidais tout de même.

- Désolé.

Elle eut un petit rire sarcastique avant de sourire, narquoise.

- Alice le dit et toi tu exécutes ? Pitoyable… tu n’es pas désolé.
- Mais si mon amour, je te le promets !
- Tu me fais donc confiance ?
- Euh… et bien… je…
- C’est bien ce que je pensais…
- Arrête Bella ! Bien sûr que j’ai confiance en toi !
- Ah ! La belle affaire. Tu me fais confiance, mais tu flippes en pensant à ce qu’il pourrait arriver dans un lieu plein d’humains !

Elle serrait le volant de plus en plus fort, moulant la forme de ses doigts dans le cuir et l’armature ; moi j’agrippais mes cheveux comme un perdu, cherchant mes mots pour me sortir de ce merdier que j’avais moi-même crée.

- C’est pas ça mon ange ! C’est juste que… tu es assoiffée, j’ai peur de ce qu’il pourrait arriver, pour toi… et puis… Ma première année en tant que vampire, j’ai dû rester totalement cloîtré, je devenais complètement fou rien que de sentir l’odeur d’un humain. Même en chassant quotidiennement. Il m’a fallu plus d’un an pour parvenir à tolérer une présence humaine pendant quelques minutes. Et toi… tu es assoiffée ! Et pourtant, je sais que tout se passera bien. Je ne comprends pas…

Bella m’observa du coin de l’œil, un sourire radieux aux lèvres, puis elle me fit un clin d’œil.

- C’est parce que j’ai le truc miracle, bébé !

L’atmosphère se détendit subitement et la route continua tranquillement. Nous arrivâmes enfin à Seattle et Bella se gara dans un parking surveillé près du port. Galanterie oblige, je lui ouvris sa portière avant qu’elle ne le fasse elle-même et l’aidais à sortir de la voiture. J’enroulais étroitement son étole autour de ses épaules – nous étions censés être en hiver – et lui donnais son sac à main avant de me laisser guider pour la soirée.
Bella voulait d’abord se promener le long de la digue. A cette heure-ci, le port était désert, les gens étant soit dans leurs logis, soit au restaurant pour le dîner. Nous marchions tranquillement, étroitement enlacés, profitant de la douceur de l’air et des embruns. Le cadre était magnifique, la lune, levée depuis longtemps, pleine, se miroitait sur les eaux légèrement tumultueuses et iodées, grosse bille argentée diffusant ses rayons épars.
Tout à coup, Bella se tendit, s’accrochant fermement à ma taille, et enfouit son visage contre mon épaule, inspirant lentement pour se détendre, tandis que je posais ma joue sur ses cheveux, savourant leur fragrance. Un couple de personnes âgées venait vers nous, profitant également de l’atmosphère sereine qu’offrait le port.

Ce qu’ils sont mignons ces deux petits. Si amoureux ! Aaaah, ça me rappelle ma jeunesse avec mon Henri…

Je souris en entendant les pensées de cette dame et celles de son époux, qui se remémorait également se jeunesse avec sa femme.
Ah ! S’ils savaient que j’avais quelques décennies de plus qu’eux à mon actif !
Alors que nous nous croisions, le couple nous souhaita une bonne soirée. Je fus surpris de voir Bella leur répondre avec le sourire, d’une voix calme et posée. Son étonnant contrôle me laissait sans voix.
Nous marchâmes encore une vingtaine de minutes jusqu’à ce que Bella m’entraîne ailleurs. Nous suivîmes un dédale de petites rues avant d’atterrir dans une petite impasse où se trouvait un bar de nuit. Je regardais mon ange, surpris qu’elle m’entraîne dans un tel lieu et haussais un sourcil, la questionnant silencieusement au sujet de son choix de sortie pour le moins inhabituel.

- Il y a un petit groupe local qui joue ici, ce soir. Je les ai découverts sur « myspace », ils sont plutôt bons. Très éclectique au niveau musical, ça devrait te plaire.

Nous entrâmes dans le bar, l’endroit était assez chaleureux, très intimiste également. A peine entrés, une hôtesse nous mit le grappin dessus en me lorgnant plus que de raison.

- Bonsoir Monsieur… mamzelle… vous désirez quelque chose ?
- Une table, à l’abri des regards si possible. Répondit sèchement Bella en se cramponnant à ma main.
- Bien sûr ! Suivez-moi je vous prie.

L’hôtesse nous entraîna à sa suite avec un déhanché excessif, plutôt risible. Elle qui se voulait sexy… heureusement que le ridicule ne tue pas !
Je dus me retenir pour ne pas sauter à la gorge de tous les hommes qui déshabillaient ma Bella du regard et avaient des pensées bien trop libidineuses à son égard. Je me focalisais alors sur la décoration du lieu.
L’endroit ressemblait à un immense salon, les murs peints dans un camaïeu de couleurs sombres, des appliques disposées ça et là berçaient la pièce d’une lumière tamisée. Un large parquet en bois, au centre, servait certainement de piste de danse, et aux bords, des dizaines de tapis marquaient l’emplacement des tables. Celles-ci, de formes rondes, étaient entourées de fauteuils et poufs en cuir, à l’apparence confortable, et installées dans des petites alcôves, de façon à ce que les clients ne se gênent pas les uns, les autres.
Au bout de la salle, il y avait une scène, remplie d’instruments de musique, des percussions à la contre-basse en passant par l’accordéon, mais ce qui détonnait, c’était l’ordinateur posé sur une table et relié à une table de mixage.
L’hôtesse nous mena à l’une des alcôves, pas très loin des musiciens, avant de partir et de nous envoyer une serveuse. Il y avait déjà pas mal de monde sirotant des boissons en attendant le début du concert.

- Vous désirez quelque chose ?

Je tournais la tête en direction de la voix nasillarde et me retrouvais face à une paire de… seins ? Épouvantablement siliconés. Je me reculais, m’appuyant contre Bella qui observait la serveuse d’un œil noir.

- Vous nous proposez quoi ? Lui demanda mon ange d’une voix blanche.
- Qu’elle est chiante sa cousine ! Ce que vous voulez. Moi par exemple. Humm… nous avons… des cocktails… un orgasme, par exemple… humm ouiii ! Quand tu veux mon beau… un baiser du diable… la beauté du diable en personne… tu me baises quand tu veux… un blow-job… quand tu connaîtras ma bouche, tu n’en voudras plus d’autres…
- Apportez-nous… deux bloody-mary s’il vous plait, et arrêtez d’agiter votre décollette sous son nez. Vous ne voyez pas que vous lui faîtes peur ? Et puis… sans vouloir vous vexer, vous n’êtes pas son genre… pas assez… viril… si vous voyez ce que je veux dire…

Je me tournais, épouvanté, vers ma Bella qui osait laisser sous-entendre que j’avais des penchants pour les hommes.
Alors que la serveuse partait prendre nos consommations, j’éteignis – enfin essayais – ses pensées avant de sourire jaune.

- Ton mensonge s’est retourné contre toi, amour…
- Ah oui ? Et comment ça ?
- Et bien… la fille s’imagine déjà me présenter l’un de ses amis… un certain Ty… bisexuel… elle croit pouvoir en profiter comme ça… et ses fantasmes sont particulièrement écœurants !
- La pauvre ! Elle ne rencontrera jamais « la trompe » Cullen ! Quel dommage…

Elle me lança un regard sulfureux dans lequel je m’abandonnais librement et totalement, et je ne remis les pieds sur terre que lorsque des accords de jazz manouche envahirent la pièce.
Bella avait raison, en fait, après quelques morceaux, le mélange des genres musicaux ne me dérangeait plus, au contraire, ils s’harmonisaient parfaitement.
Nous sirotions nos Cuba-libre, observant les quelques personnes qui évoluaient sur la piste de danse, le rhum passant bien mieux que la vodka, et je sursautais en entendant de très vieux morceaux d’avant guerre, paso-doble, valse, tango… remis au goût du jour par la musique électronique. J’étais bluffé, Bella avait décidément fait fort pour nos réconciliations.
Mon ange poussa même le vice à appeler la serveuse et lui commander deux orgasmes. La tête de cette pauvre fille valait son pesant d’or !
Sirotant mon verre avec un dégoût bien prononcé, je relevais la tête en entendant le début de « santa maria del tango », et avant de lui laisser l’occasion de refuser, j’entraînais Bella sur la piste.
Si je la trouvais sensuelle lorsqu’elle dansait, fragile humaine, j’étais bien loin du compte maintenant. La transformation lui avait conféré une grâce éthérée, ses gestes étaient d’une exquise fluidité et son corps en parfaite harmonie avec la musique.
Les pensées impures des mâles présents ne faisaient qu’amplifier au fur et à mesure de notre danse, me faisant gronder doucement. Elle est à moi. Personne d’autre qu’à moi.
Les jambes emmêlées et nos corps ondulant l’un contre l’autre, nous nous laissions entraîner par la sensualité du tango. Je la fis tourner et sa main effleura l’érection que je ne pouvais plus cacher.
J’ai envie d’elle ! Au point où j’en suis à me consumer sur place.
Je mordillais délicatement son oreille et savourais son petit gémissement de plaisir, la plaquant étroitement contre moi.

- Merde Bella ! J’ai envie de toi… là… maintenant.
- Je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée, Edward. Me dit-elle, les yeux pétillant de malice. Nous finirions dans une cellule pour « attentat à la pudeur »…
- Je t’en foutrais de l’attentat à la pudeur ! Grognais-je difficilement.

A peine le morceau terminé, je l’entraînais vers la sortie, inconscient des applaudissements et des montées de désir que nous avions provoquées chez les humains.
Je l’entraînais vivement jusqu’à la voiture, marchant d’un pas vif, et résistais tant bien que mal à l’envie de la jeter sur mon épaule pour aller plus vite.

- Ben alors Edward, tu nous fais un retour vers le passé ? Ça te manque tant que ça la période Neandertal ?
- Grmpf !

Une fois au parking, je la poussais contre la portière et me jetais goulûment sur ses lèvres, enfouissant ma langue dans sa délicieuse petite bouche. Nous nous séparâmes à bout de souffle et avant de laisser cours à mes plus bas instincts, je la poussais dans la voiture avant de prendre le volant. Nous arrivâmes rapidement à Forks après que j’eusse ralenti à quelques reprises à cause de ces fichus contrôles routiers. Une fois arrivés au cottage, je voulus la traîner dans la chambre, mais Bella en décida autrement.

- Attends ! On a toute la nuit, Edward. Viens. Suis-moi !

A contre-cœur, je la laissais me mener jusqu’à la terrasse.
L’endroit était méconnaissable.
Des guirlandes lumineuses serpentaient ça et là, suspendues aux branches d’arbres, aux plantes, aux buissons situés à proximité de la terrasse et les vasques de pierre étaient remplies de bougies flottantes et de pétales de rose. L’endroit baignait d’une lumière douce conférant chaleur et douceur à l’atmosphère.
Alice était sûrement passée par-là, ce que me confirma mon ange en criant un « merci Alice ! ».
Ma sœur avait vu les choses en grand, comme en témoignaient les verres en cristal de Baccarat et les bouteilles de sang posées sur la table basse.
Bella m’y entraîna et me fit asseoir avant de me servir un verre. Apparemment, même Emmett avait apporté sa petite touche personnelle puisque nous avions droit à des bouteilles de « Château Neuf du Cerf », de « Saint-Ursidé » ou encore de « Puma-Cadet ». Il n’y a que lui pour détourner à sa sauce des grands crus français.
J’embrassais tendrement mon ange qui avait eu l’idée de cette excellente soirée puis trinquais avec elle.

- A nous, ma Bella…
- A nous ! Jusqu’à la fin des temps. Je t’aime Edward.

Elle enroula son poignet au mien pour me faire boire son verre et déguster le mien.
Mon ange étant assoiffé, je la resservis à nouveau ; elle se jeta goulûment dessus mais refusa le troisième, prétextant que nous avions toute la nuit pour ça.
Elle m’agrippa la main et se colla à moi, puis nous nous balançâmes au rythme de la musique douce émanant des haut-parleurs. Je n’avais pas spécialement envie de danser mais c’était toujours un réel plaisir que de l’avoir contre moi.
Nous passâmes le reste de la nuit ainsi, dans les bras l’un de l’autre, à nous embrasser tantôt chastement, tantôt passionnément, jusqu’à l’aube.
Bella rejeta la tête en arrière en gémissant alors que je mordillais délicatement son cou mais elle me repoussa brusquement lorsque mes mains prirent ses seins en coupe.

- Bella… je… j’ai fait quelque chose de mal ?
- Non ! Non rien ! Je… il faut qu’on parle.

Je me raidis subitement. En général, rien de bon ne découlait de ces quelques mots. Lorsque je m’aperçus que Bella était à la fois tendue et nerveuse, mon stress et ma peur grimpèrent en flèche. Nous avions pourtant passé une excellente soirée, non ?
Elle me força à m’asseoir et s’installa à mes côtés, enfermant mes mains entre les siennes, puis elle s’acharna à grignoter sa lèvre inférieure en fuyant mon regard. Je n’avais plus peur, je paniquais complètement…

- Bella…

Elle m’intima au silence en posant un doigt sur mes lèvres.

- Edward… écoute moi, s’il te plait… je… ne… ne m’interromps pas… Ce que j’ai à te dire n’est pas facile et j’ai peur que tu le prennes mal… je…
- Tu veux me quitter ?

Les mots étaient sortis tous seuls, difficilement, tout en me lacérant le cœur au passage.

- Quoi ? Que… NON ! Bien sûr que non ! Mais où vas-tu chercher de pareilles idées ? Je t’aime Edward. Toi. Personne d’autre.
- Alors que…
- Tais-toi et écoute-moi… je… je voulais d’abord m’excuser pour mon comportement ces dernières semaines… je me doute que tu as dû vivre un véritable enfer par ma faute et j’en suis sincèrement désolée. Mais… j’avais besoin de m’éloigner… besoin de faire le point sur beaucoup de choses… j’avais besoin d’être seule et de réfléchir… je… Cette année a été particulièrement difficile pour moi… j’ai vécu un calvaire… j’ai perdu des êtres qui me sont chers… je suis devenue à moitié folle… j’étais vide… mais j’ai surtout eu l’honneur de faire ta connaissance et c’est la plus belle chose au monde qui pouvait m’arriver. Je t’aime, Edward. Je t’aime tellement que parfois ça en est douloureux. Je ne peux pas faire sans toi… Pas vivre sans toi. La… la disparition de mon père m’a fait comprendre à quel point la vie est courte. On ne sait jamais ce qu’il pourrait arriver, bon ou mauvais… ça m’a surtout permis de prendre conscience à quel point le temps est précieux et qu’il ne faut surtout pas le gâcher. Je… je ne veux plus perdre mon temps, j’en ai déjà suffisamment perdu.

Bella se releva et fit quelques pas en soufflant lourdement, les épaules tremblantes, puis elle revint à moi et posa ses mains sur mes joues, son front sur le mien. Lorsqu’elle ouvrit les yeux et vrilla son regard au mien, je fus frappé par l’intensité de celui-ci. Ses lèvres effleurèrent timidement les miennes puis elle reprit la parole.

- Tu es un homme extraordinaire, Edward Cullen. J’ai une chance inouïe d’avoir croisé ton chemin parce que si je suis heureuse aujourd’hui, c’est grâce à toi. Tu as su me reconstruire et m’apaiser. Je t’aime. Avec toi, il n’y a pas de faux-semblants et je t’aime comme tu es, tes défauts comme tes qualités. Tout ce qui fait de toi celui que tu es. Tu as un sale caractère, tu es borné, râleur et parfois égoïste, mais tu es surtout attentionné, protecteur, tendre et aimant. Je ne peux plus vivre sans toi, tu m’es essentiel, vital. Je peux me passer de sang, mais je serai incapable de me passer de ta présence. J’ai besoin de toi, c’est viscéral. A chaque fois que je te vois, te touche, j’ai l’impression que mon cœur va exploser à cause de ce trop plein d’émotions fortes que tu suscites en moi. Je t’aime, Edward Cullen. Je ne peux même pas imaginer passer une heure sans toi, je ne veux qu’une chose, une éternité à tes côtés à t’aimer et à te chérir. Me ferais-tu, Edward, l’immense honneur d’accepter d’être mon époux, que je puisse te rendre aussi heureux que je le suis ?